Pour les éditorialistes, le « coup de sang » d’Emmanuel Marcon a redonné de l’air au ministre de l’Économie qui, dans la foulée, a plaidé pour une réduction des droits des chômeurs de plus de 55 ans. Si certains s’en félicitent, d’autres feignent de s’interroger : mais qui doit, en réalité, se « réveiller » ?
« Réveillez-vous ! Je vous le dis en toute sincérité, réveillez-vous ! On est à 7 % de taux de chômage, nous n’y sommes pas ! » En poussant, comme l’écrit Libération,« un coup de gueule calculé dont il a le secret », Emmanuel Macron a, le 21 novembre, sidéré les patrons venus écouter l’annonce d’un plan destiné à favoriser les Pme industrielles innovantes. Pour Les Échos, d’ailleurs, l’interpellation présidentielle ne s’adressait pas aux seuls chefs d’entreprise. Dans un article titré « Le coup de colère d’Emmanuel Macron contre les syndicats et le patronat », Isabelle Ficek écrit : « Comme piqué au vif. Visiblement, Emmanuel Macron n’a toujours pas digéré l’accord sur le régime de retraite complémentaire Agirc-Arrco scellé entre les syndicats et le patronat. Ni la petite musique qui monte jusque dans la majorité et au gouvernement sur les doutes quant à sa capacité réformatrice pour la suite de son deuxième quinquennat ».
Aux Français de « se secouer les puces »…
Bruno Le Maire, lui, n’est pas dans la sidération. Encouragé par l’impatience présidentielle, le ministre de l’Économie et des Finances se sent au contraire pousser des ailes. Dans La Tribunedu dimanche (édition du 19 novembre), il évoque la possibilité d’une réduction de l’indemnisation des chômeurs de plus de 55 ans pour « parvenir au plein emploi ». Et invite, quelques jours plus tard, les Français à « se secouer les puces »,lors de la matinale de France Info, pour abaisser le taux de chômage à 5 %. « C’est surréaliste ! » titre Le Parisien en se faisant l’écho des réactions syndicales. Dans L’Humanité, Julia Hamlaoui s’insurge : « À en croire Bercy, ce sont les privés d’emplois qu’il faut convaincre de retourner à la tâche en leur sucrant leur indemnité. Car, pour le gouvernement, en matière de chômage il n’y a qu’un seul responsable : le chômeur, toujours suspect d’être un fainéant qui profiterait de la générosité du modèle social. »
Certains se félicitent de la proposition : « Il faut diminuer la durée d’indemnisation du chômage des seniors », appuie ainsi dans L’Opinion l’économiste Gilbert Cette, grand défenseur de la réforme des retraites récemment porté à la tête du Conseil d’orientation des retraites (Cor) en remplacement de Pierre-Louis Bras, sèchement remercié. Comme si, d’ailleurs, un simple index senior allait contraindre les entreprises à garder les plus de 55 ans, alors qu’une étude nous apprend que « l’allongement de l’âge de départ à la retraite semble avoir un impact significatif » sur leur santé mentale. L’alerte est lancée par Les Échos, qui relaient le dernier baromètre d’Empreinte humaine avec OpinionWay, en titrant : « Santé mentale : 1 salarié sur 2 s’estime en détresse psychologique ».
Pour les seniors, pas de trêve de Noël
Dans tous les cas, alors que s’ouvre la négociation sur l’emploi des seniors sur la base d’un document d’orientation relatif au « pacte de vie au travail », « le dialogue social ne connaît pas de trêve de Noël », écrit Sandrine Foulon, rédactrice en chef du site d’Alternatives économiques.Dans un billet sur le « mouron des seniors au chômage », elle prévient : « Il existe bien des façons de leur fermer la porte, et les directions françaises en connaissent un rayon. Mais la logique des parangons de vertu libérale est toujours la même, parce que c’est la plus simple pour couper dans la dépense publique : pénaliser les plus fragiles. » Ce que Jean-Christophe Féraud, dans Libération, résume d’une phrase : « Macron fait tout bien, la remontée du chômage, c’est la faute aux autres. » Et d’ironiser : « Jamais la faute à Macron évidemment, dont la politique de l’offre, chère aux libéraux des années 2000, prendra un sacré coup de plomb dans l’aile (et de vieux) si la courbe du chômage poursuit sa remontée ».
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