Chronique juridique -  La transparence pour l’égalité de rémunération femmes-hommes (suite)

Comment mieux appliquer le principe d’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes ? Par la transparence. C’est l’objet de la Directive européenne n° 2023/970 du 10 mai 2023, qui devra être transposée en droit national d’ici à juin 2026.

Édition 050 de début mai 2024 [Sommaire]

Temps de lecture : 4 minutes

L’égalité de rémunération est une obligation légale depuis une loi du 22 décembre 1972 qui reprend les dispositions de la Convention de l’Organisation internationale du travail (Oit) n° 100 de 1951, qui concrétise une disposition du Traité de Versailles de 1919.

Cette obligation légale prévoit une règle substantielle : «  Tout employeur assure, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.  »

Cette disposition figure dans les directives européennes de 1975 et de 2006, et dans l’article 157 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (Tfue). 

Il est rare qu’une disposition bénéficie d’autant de fondements juridiques et à des niveaux aussi élevés. 

Pour favoriser l’effectivité de cette règle, la loi prévoit des leviers : des négociations collectives, des procédures d’information et de consultation des représentants des travailleurs via les conseils économiques et sociaux (Cse), la Base de données économiques, sociales et environnementales (Bdese), un Index, etc. 

Une entreprise peut être à jour sur ses obligations concernant ces leviers, et pourtant continuer à discriminer, volontairement ou non. Ainsi, certaines entreprises ayant obtenu d‘excellentes notes à l’Index, ayant conclu un accord d’entreprise sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, etc. ont pourtant été condamnées pour discrimination à l’égard de femmes en matière de rémunération. 

La directive sur la transparence des rémunérations aura un impact sur l’évolution du contenu et des objectifs de « l’Index » et de la Bdese. Il convient donc d’anticiper cet impact.

Une illustration emblématique. La directive mentionne L’égalité de rémunération pour un même travail ou un travail de même valeur. Or, pour l’Index, le décret mentionne en son article D. 1142-2 que l’indicateur 1 concerne l’écart de rémunération «  par catégorie de postes équivalents  ». Cette formulation n’est pas équivalente à celle de «  travail de valeur égale  ». Le décret relatif à l’Index est donc en deçà des obligations légales d’égalité de rémunération posées par la loi (Code du travail) et par le droit de l’Union européenne, en dernier lieu par la directive « transparence des rémunérations ». 

Transparence des rémunérations avant l’embauche 

1. Les candidats à un emploi ont le droit de recevoir, de l’employeur potentiel, des informations sur : 

  1. la rémunération initiale ou la fourchette de rémunération initiale, sur la base de critères objectifs non sexistes, correspondant au poste concerné  ; 
  2. le cas échéant, les dispositions pertinentes de la convention collective appliquées par l’employeur en rapport avec le poste. 

Ces informations sont communiquées de manière à garantir une négociation éclairée et transparente en matière de rémunération, par exemple dans un avis de vacance d’emploi publié, avant l’entretien d’embauche ou d’une autre manière.

2. L’employeur ne demande pas aux candidats leur historique de rémunération au cours de leurs relations de travail actuelles ou antérieures. 

3. Les employeurs veillent à ce que les offres d’emploi et les dénominations de postes soient non sexistes et à ce que les processus de recrutement soient menés de façon non discriminatoire, de manière à ne pas compromettre le droit à l’égalité des rémunérations pour un même travail ou un travail de même valeur (ci-après dénommé «  droit à l’égalité des rémunérations  »). 

Transparence de la fixation des rémunérations et de la politique de progression de la rémunération 

1. Les employeurs mettent à la disposition de leurs travailleurs, d’une manière facilement accessible, les critères qui sont utilisés pour déterminer la rémunération, les niveaux de rémunération et la progression de la rémunération des travailleurs. Ces critères sont objectifs et non sexistes.

2. Les États membres peuvent exempter les employeurs dont les effectifs comptent moins de 50 travailleurs de l’obligation relative à la progression de la rémunération 

Droit à l’information 

1. Les travailleurs ont le droit de demander et de recevoir par écrit des informations sur leur niveau de rémunération individuel et sur les niveaux de rémunération moyens, ventilées par sexe, pour les catégories de travailleurs accomplissant le même travail qu’eux ou un travail de même valeur que le leur. 

2. Les travailleurs ont la possibilité de demander et de recevoir ces informations par l’intermédiaire de leurs représentants. Si les informations reçues sont inexactes ou incomplètes, les travailleurs ont le droit de demander, personnellement ou par l’intermédiaire de leurs représentants, des précisions et des détails supplémentaires raisonnables concernant toute donnée fournie, et de recevoir une réponse circonstanciée. 

3. Les employeurs informent tous les travailleurs, une fois par an, de leur droit à recevoir les informations ainsi que des mesures que ceux-ci doivent prendre pour exercer ce droit. 

4. Les employeurs fournissent les informations dans un délai raisonnable et, en tout état de cause, dans un délai de deux mois à compter de la date de la demande. 

5. Les travailleurs ne sont pas empêchés de divulguer leur rémunération aux fins de l’application du principe de l’égalité des rémunérations. En particulier, les États membres mettent en place des mesures visant à interdire les clauses contractuelles qui empêchent les travailleurs de divulguer des informations sur leur rémunération.

6. Les employeurs peuvent exiger des travailleurs ayant obtenu des informations autres que celles concernant leur propre rémunération ou niveau de rémunération qu’ils ne les utilisent pas à des fins autres que l’exercice de leur droit à l’égalité des rémunérations.

Accessibilité des informations 

Les employeurs fournissent toute information partagée avec les travailleurs ou les candidats à un emploi dans un format accessible aux personnes handicapées et qui tienne compte de leurs besoins particuliers. 

Document 

Le Haut Conseil à l’égalité (formation égalité professionnelle) a remis le 8 mars 2024 un rapport intitulé «  Salaires  : Cinq ans après l’Index, toujours pas d’égalité. Des propositions pour améliorer l’outil  ».

Sitographie  :