McDonald’s  : fissures dans la forteresse

Des salariés français et américains des fast-foods se sont retrouvés pour coordonner leur action contre les pratiques abusives de la multinationale.

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Des salariés français et américains des fast-foods se sont retrouvés pour coordonner leur action contre les pratiques abusives de la multinationale.

Cela fait maintenant deux ans que salariés français et américains des fast-foods sont en contact et échangent sur leurs pratiques, dans le cadre d’une vaste campagne englobant les grandes enseignes du secteur (Kfc, McDonald’s, Burger King, Wendy’s…). C’est dans ce contexte que, le 14 janvier dernier, représentants de la Cgt et de la Seiu (Union internationale des employés de services, 2 millions de membres) se sont réunis à Paris pour à la fois dénoncer « le modèle McDonalds’s et discuter des actions à mener » pour lutter contre les pratiques abusives du géant de la restauration rapide. Déjà aux États-Unis, le mouvement dénommé « Fight for 15 » s’est étendu, le taux horaire de 15 dollars de l’heure ayant été adopté par plusieurs Etats américains.

Au cours des dernières semaines, les pratiques fiscales de McDo, mises notamment en évidence par l’enquête « Unhappy Meal  », ont fait l’objet de plusieurs procédures. Le 3 décembre dernier, la commission européenne a ainsi ouvert une enquête sur le traitement fiscal accordé à la multinationale par le Luxembourg : ce traitement –pour le moins très favorable- est-il contraire aux règles aux règles en matière d’aides d’Etat de l’Union européenne ?

Sur la base en effet de ce que l’on appelle des « rulings » fiscaux, McDonald’s Europe Franchising ne paie aucun impôt sur les sociétés au Luxembourg depuis 2009, alors, note la commission dans un communiqué, « qu’elle enregistre de plantureux bénéfices. » McDo ne paie aucun impôt sur les bénéfices, en outre, aux États-Unis.

Ce qui a fait dire à Margrethe Vestager, commissaire chargée de la politique de concurrence : « Les conventions conclues entre deux pays ont pour objet d’éviter le cas de double imposition, et de non de justifier une double non-imposition ». Rappelons que l’enquête menée par les syndicats à mis en évidence un manque gagner fiscal évalué à plus d’un milliard d’euros à l’échelle européenne.

Un impact sur la rémunération des salariés

Ce qui est présenté comme des pratiques « d’optimisation » par la direction ont ainsi des conséquences importantes en matière de fiscalité. Mais pas seulement : elles impactent aussi fortement les conditions de travail et de rémunérations des salariés. C’est ce double mouvement que veulent dénoncer les syndicats.

C’est le sens, notamment, de la plainte déposée, le 18 décembre dernier, par les élus du Comité d’entreprise de McDonald’s Ouest parisien « pour blanchiment de fraude fiscale en bande organisée, abus de biens sociaux et présentations de comptes inexacts, faux et usage de faux, et recel » (voir Options n°614). Plus récemment, une coalition d’associations italiennes de consommateurs a annoncé le dépôt auprès de la Commission européenne d’une plainte officielle pour des pratiques anticoncurrentielles dans son réseau de franchises. 

Aussi le but de cette réunion était-il « d’évaluer l’avancée des actions conduites aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis afin d’interpeller les autorités compétentes sur l’illégalité de ces pratiques et d’y mettre un terme ». Pour Scott Courtney, directeur opérationnel du Seiu, « l’étendue du groupe McDonald’s appelle en effet une lutte d’ampleur contre ses abus, néfastes aux salariés comme aux consommateurs et aux contribuables ».

Dans ce combat, « la menace du chantage à l’emploi ne peut fonctionner, souligne Amel Kefti, secrétaire fédérale en charge de la restauration rapide à la Cgt. Pour McDo, qui est une entreprise extrêmement rentable, la France représente le premier marché européen, le deuxième au niveau mondial  ». 

Pétition

Au nom de la Fédération du commerce et des services de la Cgt, une pétition montre comment la structuration de l’entreprise (franchisés d’une part et filiales d’autre part) a des conséquences à la fois sur la représentation syndicale et les conditions de travail. S’appuyant sur le droit européen, notamment la Charte des droits fondamentaux, la fédération fait un certain nombre de demandes à l’Union européenne.

Parmi elles : œuvrer pour la mise en œuvre « de dispositifs de protection efficaces afin d’éviter l’utilisation de structures morcelées artificielles ayant un impact négatif sur la représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs.

Christine Labbe

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