Platines – Keith Jarrett : un clavier bien tempéré

Multi-instrumentiste, œuvrant tant dans le jazz que dans la musique classique, Keith Jarrett aime beaucoup Bach, père et fils. Il interprète Carl Philipp Emanuel Bach dans 2 Cd où il déploie tout son art.

Édition 034 de mi juillet 2023 [Sommaire]

Temps de lecture : 1 minute

Options - Le journal de l’Ugict-CGT

Y a-t-il besoin de présenter Keith Jarrett, l’auteur du génial Concerto Köln ? Le soir du 24 janvier 1975, le musicien américain est programmé à l’opéra de Cologne. Épuisé, sortant d’une longue série de concerts, il s’installe au piano, joue cinq notes : sol, , do, sol, la. À la fatigue s’ajoute la frustration de devoir jouer sur un instrument qui sonne comme « un piano dans lequel on aurait mis des punaises ».

Dépité, il laisse aller ses mains sur les touches, plaque quelques accords, improvise durant plus d’une heure. Ce qui ne devait être qu’un concert parmi d’autres devient par la grâce d’un soir l’un des plus grands disques de jazz jamais gravés. Où Keith Jarrett est-il allé chercher l’inspiration  ? Peut-être dans le répertoire baroque dont il nourrit son art – Jean-Sébastien Bach, en particulier.

De lui, il a enregistré Le Clavier bien tempéré, les Variations Goldberg ou les Suites françaises, montrant à chaque fois une révération peu commune. C’est avec le même respect qu’il abordait les Sonates Württemberg de Carl Philipp Emanuel, dans cet enregistrement inédit de 1994.

Deuxième fils du Cantor de Leipzig, la musique de C.P.E. Bach se caractérise par ses modulations, ses brusques changements de dynamiques et de tempi, des sonorités jamais exprimées jusque-là, annonçant Mozart – Haydn et lui l’admiraient – et le style classique. Certains pourront trouver l’approche de Jarrett un peu cérébrale, mais son art du phrasé laisse sans voix.