La directive européenne sur les lanceurs d’alerte doit être transposée dans le droit français. Mais le sera-t-elle à bon niveau ? Vingt-neuf organisations s’en inquiètent et lancent une pétition pour un cadre juridique réellement protecteur.
La directive européenne sur les lanceurs d’alerte doit être transposée dans le droit français. Mais le sera-t-elle à bon niveau ? Vingt-neuf organisations s’en inquiètent et lancent une pétition pour un cadre juridique réellement protecteur.
S’agissant de la protection des lanceurs d’alerte, l’enjeu est double. Institutionnel évidemment, mais surtout démocratique. L’actualité en témoigne, qui voit régulièrement émerger des scandales révélés par des femmes et des hommes ayant pris sur eux de les exposer au grand jour. La plupart de ces affaires nous concernent toutes et tous à divers titres : sanitaires, écologiques, économiques, protection de la vie privée… Chacun, au-delà de ses retombées immédiates, contribue à saper la confiance dans les autorités publiques, la justice, décrédibilise la notion même d’intérêt général.
Malgré d’énormes progrès réalisés dans la dernière période et dans l’opinion publique, le destin des « lanceurs d’alerte » reste souvent douloureux. Salariés, ils risquent d’être licenciés, harcelés, mis au placard. Lorsqu’il s’agit de militants associatifs, de parents d’élèves, de riverains… ils sont dénigrés et doivent affronter des agressions verbales, physiques, voire des poursuites judiciaires abusives. Leurs soutiens – journalistes, associations, syndicats – mais aussi leurs proches supportent les mêmes types de conséquences et se heurtent à la difficulté majeure d’identifier à qui s’adresser pour que cessent les abus qu’ils dénoncent.
La directive européenne peut permettre de gagner en protection
Devant les révélations à répétition, poussé par l’émotion publique, le gouvernement a, en 2016, promulgué une loi dite Sapin II qui, notamment, interdit de licencier ou de rétrograder les lanceurs d’alerte. Encore doivent-ils, pour bénéficier de cette protection, être reconnus comme tels. Or, cela relève d’un véritable parcours du combattant. À quoi s’ajoutent de nombreuses lacunes, telles que l’absence de garantie sur le traitement effectif des alertes, ce qui est bien souvent la première demande des lanceurs d’alerte.
La transcription de la directive européenne, qui doit se faire avant la fin de l’année 2021, réglera-t-elle cette situation de façon satisfaisante ? C’est possible : la directive améliore significativement la protection en imposant aux États un certain nombre d’avancées. Ainsi, elle met fin à l’obligation, pour un salarié, d’alerter d’abord au sein de son entreprise – obligation qui l’expose bien souvent aux représailles ou qui fait courir le risque de destruction de preuves. Mais, paradoxe préoccupant, elle laisse aux États le soin de définir eux-mêmes les modalités d’amélioration de leur législation…
D’où la mobilisation de la Maison des lanceurs d’alerte et de plusieurs dizaines d’autres organisations pour porter dans le débat public douze propositions concrètes visant à compléter les dispositions de la directive. Elles proposent, de même, la création d’un fonds de soutien permettant des aides d’urgence aux lanceurs d’alerte en difficulté ; la simplification des procédures avec la mise en place d’un guichet unique en capacité de s’assurer qu’elles soient suivies d’effets ; le renforcement du rôle d’appui des syndicats sur les lieux de travail et la possibilité de sanctionner les « étouffeurs d’alerte ». Ces demandes sont d’ailleurs appuyées par le Défenseur des droits et par la Commission nationale consultative des droits de l’homme Pour autant, l’exécutif ne donne aucun signe d’un engagement fort en ce sens. D’où l’invitation lancée à signer massivement l’appel qu’elles adressent à l’exécutif.
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