L'Édito -  Répondre à l’autoritarisme du gouvernement par nos ambitions sociales et démocratiques

Par Agathe Le Berder, secrétaire générale adjointe de l’Ugict-CGT

Il s’était donné 100 jours pour apaiser le pays après les six mois de mobilisation intense contre la réforme des retraites. Force est de constater que le président de la République et son gouvernement n’ont fait que raviver la colère sociale.

Édition 034 de mi juillet 2023 [Sommaire]

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Agathe Le Berder, secrétaire générale adjointe de l’Ugict-Cgt © Bapoushoo

Le 27 juin 2023, un adolescent est mort, tué à bout portant par un policier dans le cadre d’un contrôle routier. Il rejoint l’insoutenable liste de noms de jeunes hommes non-blancs et issus de quartiers populaires tués par la police dans le cadre de contrôles. Les circonstances de ce drame et la répression incompréhensible de la marche blanche organisée à Nanterre pour réclamer la justice ont fait exploser la colère des jeunes des quartiers, partout en France. Plutôt que de répondre à la spirale destructrice de la violence, notamment par des engagements immédiats de justice sociale, le gouvernement – par la voie de ses ministres de la police et de la justice – a mis en œuvre des mesures inédites de répression.

La dernière expression en date de celle-ci est l’interdiction de la marche du comité Adama, organisée pourtant pacifiquement chaque année à Beaumont-sur-Oise. La CGT et de nombreuses autres organisations ont appelé à s’y rendre et à marcher devant la gendarmerie où Adama Traoré est mort, en 2016, après un plaquage ventral exercé sur lui par trois agents.

Un débat démocratique essentiel doit avoir lieu sur les conditions d’exercice des missions des forces de l’ordre. Il doit débuter par la refonte de la loi de février 2017 sur l’usage des armes à feu.

Lors de son audition au Sénat le 5 juillet 2023, le ministre de l’Intérieur n’a fait aucune annonce allant dans le sens de nos orientations. Il a au contraire posé le cadre de sa pensée en balayant les accusations de racisme au sein de son administration et en rappelant « le plus grand respect » qu’il a pour le président du syndicat Alliance Police nationale, auteur d’un appel conjoint, avec Unsa Police, à la « guerre » contre les « nuisibles ».

Comment le ministre de l’Intérieur a-t-il en outre décrit son administration et ses professionnel·les ? En les comparant à d’autres. Il a ainsi annoncé être à la tête d’une administration qui recrute des “enfants”, dont les profils seraient différents de ceux – à bac+4 ou bac+5 et avec « un capital social important » – des ministères de la Justice et de l’Education nationale. Voilà un responsable gouvernemental qui n’a pas l’intention de faire dans la nuance. Après tout, pourquoi le ferait-il quand un haut fonctionnaire placé directement sous son autorité s’autorise à remettre en cause le cadre légal existant pour préconiser « deux claques et au lit » comme réponse aux émeutes urbaines ?

Le discours et les actes du ministre de l’Intérieur ne sont pas sans nous rappeler ceux du patronat. Il porte tout d’abord une conception verticale du pouvoir et autoritaire des relations sociales. Puis met en opposition le salariat sur la base du niveau de responsabilité et de qualification, tout en refusant d’endosser sa propre responsabilité dans les politiques managériales qui sont mises en œuvre. Ces stratégies sont aussi la marque de fabrique de l’extrême-droite.

Face à l’autoritarisme et aux tentatives de division du gouvernement, du patronat et des groupes d’extrême-droite, il n’y a pas de fatalité. Le mouvement social contre la réforme des retraites a démontré qu’une partie massive de la population était prête à se mobiliser en mettant en lien les questions sociales et démocratiques. A partir de ce rapport de forces construit dans l’unité syndicale, la CGT propose aujourd’hui 100 mesures d’urgence. 100 mesures sociales pour répondre à l’échec des « 100 jours d’apaisement » du gouvernement.