Le 4 mars, le Parlement a voté l’inscription de l’Ivg dans la Constitution. Cet évènement majeur a été fêté dignement le 8 mars, journée de lutte internationale pour le droit des femmes, par 200 000 manifestant·es qui ont répondu à l’appel à la grève féministe lancé par l’intersyndicale et les associations féministes. À quelques centaines de mètres de la place Vendôme, lieu de la cérémonie de scellement, les manifestant·es ont battu le pavé parisien pour réclamer, en plus du droit intangible et constitutionnel d’avorter, la possibilité de le faire.
Bien que la célébration ait occupé la totalité de l’espace médiatique, que l’autosatisfaction du président de la République ait été affichée en grand, sur tous les écrans, la tentative de rendre inaudibles les revendications des féministes a échoué. Elles ont tenu à faire passer leur message. Aujourd’hui, une femme sur quatre est obligée de changer de département pour pouvoir accéder à l’Ivg, quelquefois à plus de 100 kilomètres de son domicile. Cette situation inacceptable est la conséquence directe de l’épidémie de fermetures de services spécialisés, dont ce gouvernement est responsable. Elles n’abandonneront pas la lutte.
Plus on gravit l’échelle des salaires, plus les inégalités se creusent
Parmi les manifestantes et les manifestants, de nombreuses jeunes femmes fraîchement diplômées de l’Enseignement supérieur étaient présentes. Et pour cause, en moyenne, toutes catégories professionnelles confondues, les femmes gagnent un quart de salaire en moins que les hommes. Mais, en y regardant de plus près, on constate que l’écart se creuse à mesure que l’on gravit l’échelle des salaires. Là où se concentrent les salarié·es les plus diplômé·es.
En équivalent temps plein, c’est-à-dire en occultant les temps partiels :
- les 10 % des femmes les moins bien rémunérées ont un salaire mensuel net de 5 % inférieur à celui des hommes ;
- les 10 % des femmes les mieux rémunérées ont un salaire mensuel net inférieur de 17 % à celui des hommes (données Insee 2021).
La semaine « en quatre jours », une fausse bonne réponse à une vraie question
Le 12 mars a aussi été l’occasion pour le gouvernement de développer, par la voix de sa ministre du Travail, son nouveau projet : la semaine « en quatre jours » sans réduction du temps de travail. Un projet pour répondre, selon le Premier ministre, « à de nouvelles attentes de la part des salarié·es sur l’équilibre entre vie professionnelle et familiale ». Là aussi, c’est à peu de frais que le gouvernement utilise une situation majoritairement subie par les femmes comme alibi à ses projets les plus funestes, dans le secret espoir d’obtenir leur soutien. En ce qui concerne les femmes cadres, il est à côté de la plaque.
Une récente étude de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) précise qu’en la matière, 48 % des femmes cadres privilégieraient plutôt une réduction du temps de travail, contre 44 % des hommes. Et les résultats de l’enquête 2023 de l’Observatoire du télétravail nous apprennent que 82 % des cadres, dont une majorité de femmes, plébiscitent le télétravail pour mieux concilier vie professionnelle et vie personnelle. Preuve s’il en est que le télétravail est un symptôme davantage qu’une solution.
Les cadres travaillent en moyenne près de quarante-quatre heures par semaine
Les salarié·es ont besoin de réduire la place disproportionnée du temps de travail par rapport aux autres temps de vie. La réponse se situe dans la semaine de quatre jours avec réduction du temps de travail.
Dans les faits, les cadres travaillent en moyenne près de quarante-quatre heures par semaine, bien au-dessus des trente-cinq heures légales, sans voir augmenter de façon significative leur salaire. Dans un contexte où la durée du temps consacré au travail au cours de la vie vient d’être augmenté de deux années supplémentaires pour avoir droite à une retraite, un projet qui consisterait à augmenter la durée quotidienne de travail sans en réduire la durée hebdomadaire, pour le même salaire et la même charge de travail, est en totale contradiction avec les aspirations des salarié·es.
Test négatif auprès des salarié·es de l’Urssaf Picardie
Penser que les femmes trouveraient satisfaisant de travailler le même nombre d’heures, en moins de jours, pour répondre aux exigences des responsabilités familiales dont elles sont encore majoritairement en charge, est une aberration. Ce n’est pas un jour sans travail qui permettra de récupérer les enfants à la sortie de l’école les autres jours de la semaine…
Les salarié·es de l’Urssaf Picardie, dont 72 % sont des femmes, ont d’ailleurs répondu par la négative à cette proposition. Sur 200 salarié·es concerné·es, seules trois l’ont acceptée. En matière d’attente on fait mieux.
Sans doute faudra-t-il bien plus que la constitutionnalisation de l’Ivg pour convaincre les femmes de la volonté de ce gouvernement de prendre en considération leurs attentes. En matière d’égalité entre les femmes et les hommes, l’hirondelle ne fait pas le printemps !