Estimer scientifiquement l’ampleur du microtravail, l’enquête tient et de la gageure et de l’orfèvrerie. D’où l’intérêt d’une récente étude.
Le microtravail échappe largement à la statistique publique. Loin de ses cousins de chez Uber ou Airbnb, il est invisible et, bien qu’indispensable à tout un pan de l’économie numérique lié au big data, il reste largement à la marge de l’économie formelle. On sait que les plateformes de microtravail offrent à des foules de prestataires individualisés des tâches fragmentées en les rémunérant parfois quelques centimes le clic (1). Indispensable au développement des intelligences artificielles actuelles. Trois chercheurs, respectivement de la Maison des sciences de l’homme de Saclay, du Cnrs et de Télécom ParisTech, ont tenté d’évaluer la population concernée en France, à partir d’études menées sur les plateformes les plus représentatives (2).
Cette étude a d’abord permis de dégager une typologie distinguant trois populations en fonction de leurs modes d’engagement : près de 15 000 individus dits « très actifs », dont la plupart sont présents sur ces plateformes au moins une fois par semaine ; plus de 52 000 « réguliers », plus sélectifs et présents au moins une fois par mois ; enfin, près de 267 000 « occasionnels », plus hétérogènes, alternant entre l’inactivité et une pratique plus intensive du microtravail, en fonction de leurs périodes de chômage ou durant un congé maternité.
L’étude souligne à cet égard, et à titre de comparaison que dans un de ses rapports, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) estimait le nombre de chauffeurs Uber en France à environ 14 000 (3). Toutes plateformes confondues, il y aurait environ 27 000 chauffeurs de Vtc en France (4). Quant aux livreurs à vélo, Deliveroo affirme en avoir 9 300 en France en 2018. L’estimation montre donc que, d’un point de vue quantitatif, le microtravail représente, en France, un effectif comparable voire supérieur à celui des plateformes VTC et de livraison express. Loin d’être anecdotique, il constitue un véritable défi aux organisations traditionnelles de représentation collective.
Louis Sallay
Lire « Crowdworking : le business model de demain ? » Options, mars 2017.
Clément Le Ludec, Paola Tubaro, Antonio A. Casilli, « Combien de personnes micro-travaillent en France ? Estimer l’ampleur d’une nouvelle forme de travail », i3Working Papers Series, 2019, 20 pages.
Nicolas Amar et Louis-Charles Viossat, « Les plateformes collaboratives, l’emploi et la protection sociale », Igas, 2016, 166 pages.
Sébastien Pommier, « Les vrais chiffres du marché des VTC et des taxis en France », L’Express, 18 février 2018.
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