Chronique européenne -  Vu d’Europe – Retraites, salaires, fiscalité… combattre toutes les inégalités !

La rentrée a commencé sérieusement dans la capitale belge pour donner le coup d’envoi de 2023, avec un certain nombre d’activités pour nous tenir occupés tout au long du mois. Bien reposés et dotés d’un large mandat, nous sommes en bonne voie d’agir en faveur des travailleurs de la bulle bruxelloise.

Édition 024 de fin janvier 2023 [Sommaire]

Temps de lecture : 4 minutes

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Par Nayla Glaise, présidente d’Eurocadres

Pour commencer, félicitons nos collègues français pour le succès lors de la mobilisation du 19 janvier. Cette manifestation a envoyé un message non seulement au gouvernement français, mais aussi aux gouvernements du monde entier, avec une démonstration de force unifiée qui est applaudie par nous tous à Eurocadres. Les efforts visant à avoir un impact négatif sur vos conditions de travail et votre santé ne peuvent être tolérés, et nous sommes convaincus que vous réussirez à inverser le cours du gouvernement. Avec l’ensemble de nos membres, nous vous adressons nos meilleurs vœux et notre solidarité dans toutes les négociations et mobilisations, votre force en nombre étant le reflet de votre excellent travail de terrain dans toute la France. 

Violences contre les femmes et violence domestique

Après des mois de discussions, la position du Parlement sur la proposition de directive, Combattre la violence contre les femmes et la violence domestique a été présentée par les co-rapporteurs Evin Incir et Frances Fitzgerald le 12 janvier. Lors d’une réunion conjointe des commissions LIBE et FEMM, les deux rapporteurs ont détaillé comment les 179 amendements proposés amélioreraient un texte déjà ambitieux.

Concrètement, les amendements déposés renforcent le texte en ajoutant :

  • Un accent plus important sur le lieu de travail, avec la charge pour les employeurs de développer, en consultation avec les représentants des travailleurs, des stratégies inclusives, intégrées et spécialisées pour atténuer et prévenir le harcèlement sexuel sur le lieu de travail.
  • La responsabilité de l’employeur de préserver la santé des travailleurs, en incluant la violence et le harcèlement au travail dans les évaluations de la santé et de la sécurité.
  • La formation du personnel d’encadrement, assurée avec la participation des représentants des travailleurs, des partenaires sociaux et d’experts indépendants.

La mise à disposition de canaux de signalement sûrs et anonymes.

  • La non-discrimination des victimes et des personnes qui signalent des cas de harcèlement/abus/violence.
  • L’anonymat et la non-divulgation des données personnelles aux autorités nationales chargées des migrations.
  • L’accès et le financement de programmes de formation qui remettent en cause le sexisme et les stéréotypes liés au genre.
  • La collecte de données sur les incidents sur le lieu de travail afin d’informer les futures actions politiques ciblées.

Beaucoup de ces éléments sont conformes aux demandes des syndicats depuis la présentation du texte, et Eurocadres se félicite des changements suggérés par les deux rapporteurs. Malgré cela, de nombreux éléments peuvent encore être améliorés, notamment en veillant à ce que : lorsque la violence domestique a un impact direct sur la capacité de la victime à participer à son travail, elle est considérée comme un problème sur le lieu de travail, la violence domestique et la cyberviolence reçoivent la même importance que le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, le préjudice économique est inclus comme un élément contre lequel il faut se protéger, la sous-déclaration est correctement traitée sur les lieux de travail et les formations sont rendues obligatoires et annuelles. 

Indépendamment des défis, la société civile, les syndicats et les partenaires sociaux ont réaffirmé leur soutien à l’adoption d’un texte fort, l’eurodéputé Evin Incir ayant raison de souligner que ce texte représente « l’histoire en train de se faire ». Si les négociations politiques ne pourront commencer que lorsque le Parlement aura finalisé son texte, le député Frances Fitzgerald est convaincu que l’institution « enverra un message fort et contribuera à créer une directive forte ».

Accord politique sur la transparence des rémunérations

Sur le thème de l’égalité, un accord politique a été trouvé en décembre sur la directive relative à la transparence des rémunérations entre les hommes et les femmes, qui consacre le concept de salaire égal pour un travail égal dans la législation européenne. Après un processus long et compliqué, la question centrale reste la suivante : quels sont les nouveaux droits acquis par les travailleurs ? Avec un rôle clair pour les syndicats, nous pouvons passer à la réparation des pertes d’opportunités pour les travailleurs et garantir un salaire égal pour un travail de valeur égale. Notre infographie montre comment les travailleurs peuvent mettre en œuvre la parité salariale sur tous les lieux de travail européens ! 

Avec le forum économique mondial qui s’est tenu en janvier à Davos, l’inégalité au cœur de la société européenne a également été mise à nu par Oxfam, avec leur dernier rapport montrant que depuis 2020, les 1 % les plus riches ont amassé presque deux fois plus que le reste du monde combiné. La fortune des milliardaires a augmenté de 2,7 milliards de dollars par jour, alors que les travailleurs ont dû supporter la majorité de la charge fiscale mondiale, parallèlement aux crises continues de l’énergie et du coût de la vie, et qu’au niveau mondial, la pauvreté a augmenté pour la première fois en 25 ans. Eurocadres soutient pleinement l’appel d’Oxfam en faveur d’une taxe allant jusqu’à 5 % sur les multimillionnaires et les milliardaires du monde entier, ce qui pourrait rapporter 1700 milliards de dollars par an, soit suffisamment pour sortir 2 milliards de personnes de la pauvreté. Nous réitérons nos appels en faveur d’une transition verte juste et équitable dans toute la société européenne. 

Directive sur les travailleurs de plateformes  : les lobbies à l’œuvre

Malheureusement, toujours en janvier 2023, la directive sur les travailleurs des plateformes a rencontré un autre obstacle, car les députés du centre et du centre-droit ont permis aux tactiques obscures des lobbyistes des plateformes de remettre en question la position du Parlement. Le 2 février, les députés européens seront ainsi invités à modifier leur position afin de renvoyer la charge de la preuve sur les travailleurs, une décision qui a été prouvée par le lanceur d’alerte d’Uber Mark MacGann et les syndicats comme étant préjudiciable aux travailleurs. 

En dépit d’un ensemble de preuves en faveur de la position actuelle du Parlement et de la Commission, les députés européens de Renew Europe et du Parti PPE continuent d’être dupés par des sociétés de plateforme qui exploitent les travailleurs et font passer les profits avant les personnes. Avec un grand nombre de syndicats et d’ONG, Eurocadres continuera à plaider pour l’adoption de la position sans amendements, pour le bien des travailleurs dans les positions les plus précaires. D’ici là, solidarité avec tous ceux qui luttent contre la réforme des retraites du gouvernement français !