Platines – Alma Mahler ne fut pas que dévouée à Gustav

Pendant neuf ans, elle fut une épouse aux ambitions artistiques contrariée. Une carrière musicale lui fut refusée. On lui doit pourtant seize lieder étonnants de maturité et de finesse.

Édition 032 de mi-juin 2023 [Sommaire]

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En musique aussi, la double peine existe. Pour pouvoir épouser Gustav Mahler, de vingt ans son aîné, en 1902, la jeune Alma Maria Schindler dut, à la demande de celui-ci, renoncer à toute ambition artistique pour se consacrer entièrement au bien-être de son futur mari, comme il devait le lui dire une fois les noces célébrées : «  Tu n’as désormais qu’une profession : me rendre heureux.  »

Née en 1879 d’un père peintre et d’une mère chanteuse, Alma avait montré jusque-là de belles dispositions dans l’un et l’autre domaines, s’attirant les louanges de Klimt et de Zemlinsky, auprès de qui elle avait appris le piano et la composition.

Elle s’illustrera surtout dans l’art du lied. Son corpus se compose de seize mélodies inspirées de poèmes de Heinrich Heine, Rainer Maria Rilke ou encore Leo Greiner. S’ils ne rompent pas avec le style romantique et wagnérien, tout en demi-teintes, des pianissimos sur le ton de l’intimité et de la confidence et des forte expressifs, ils présentent en revanche un charme (Leise weht ein erstes Blühn), une délicatesse (In peines Vate), et une maturité (Kennst du meine Nächte) étonnants pour la jeune femme qu’elle était quand elle les composa.

Sa légende se nourrira malheureusement surtout d’une liberté amoureuse assumée : Walter Gropius, créateur du Bauhaus, le peintre Oskar Kokoschka ou l’écrivain Franz Werfel. Alma ne réalisa jamais son rêve de devenir compositrice. Mais son œuvre reçoit ici un bel hommage de la part de la soprano Elise Caluwaerts et de la pianiste Marianna Shirinyan.