Au Bureau de recherches géologiques et minières, la Cgt fait de l’égalité une priorité de son activité

Quatre ans après des résultats électoraux décevants, la Cgt s’est redressée en gagnant, lors du dernier scrutin, plus de 9 points dans le collège ingénieurs et cadres. Avec quelle stratégie syndicale ? Premiers enseignements.

Édition 027 de mi-mars 2023 [Sommaire]

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La compréhension des phénomènes géologiques est l’un des objectifs de l’activité de l’établissement public. © MaxPPP

Au lendemain d’élections professionnelles décevantes, en décembre 2019, les adhérents du syndicat Cgt du Bureau de recherches géologiques et minières (Brgm) concluent à la nécessité de renouer avec le terrain pour se rapprocher des besoins des salariés. Dans la foulée éclatent la mobilisation contre la première tentative de réforme des retraites, puis l’épidémie de Covid-19. Trois ans d’action plus tard, la Cgt a enregistré une progression de 8,3 points aux élections professionnelles de décembre 2022.

Dans cet établissement public à caractère industriel et commercial (Epic), placé sous la tutelle des ministères chargés de la Recherche, de l’Écologie et de l’Économie, la Cgt représente désormais 31,4 % des salariés, passant ainsi en deuxième position devant la Cfe-Cgc, en chute libre. La CFDT se maintient autour de 42 %. Ici, trois quarts des effectifs (un peu plus de 1 000 salariés) sont des cadres et ingénieurs, dont 60 % d’hommes. Le quart restant est composé de techniciens et d’assistants, majoritairement des femmes. «  Pour la première fois, la Cgt fait un meilleur score dans le collège des ingénieurs et cadres que dans celui des Oetam, note Christophe Innocent, secrétaire du syndicat, délégué syndical et élu au Cse. Nous y gagnons 9,4 points, pour atteindre 32 % des voix alors que la Cfe-Cgc perd 7,8 % et la Cfdt 1,5 %  ». Pour autant, chez les Oetam, la Cgt gagne 5,2 points pour atteindre 29,8 % des suffrages exprimés.

La Cgt passée en deuxième position

Pour cela, il a d’abord fallu s’adapter au contexte si particulier des confinements successifs. « Comme partout, le télétravail a explosé avec le Covid-19, se rappelle Christophe Innocent. Or, la direction des ressources humaines nous empêche l’usage des mails internes  ». Qu’à cela ne tienne, la Cgt se met alors à utiliser la plateforme de tchat et visioconférence Teams, adoptée par l’établissement quelque temps avant la pandémie. Et décide de maintenir, à travers cet outil, les réunions qu’elle organisait hebdomadairement au siège orléanais du Brgm, où se concentrent un peu plus des deux tiers des effectifs. Du coup, les adhérents des antennes régionales peuvent y participer, renforçant ainsi la dynamique du syndicat.

En 2020, c’est aussi sous la forme d’un webinaire que le syndicat tient son désormais traditionnel rendez-vous annuel autour de l’égalité femmes-hommes, le 8 mars. « Depuis 2017, nous organisions cette réunion à la cafétéria du centre scientifique d’Orléans, à 15h40. Ce qui s’accompagnait aussi d’un tract diffusé largement sur le sujet, explique le délégué syndical. En format webinaire, nous avons atteint les 80 connexions ». Une participation largement accrue par rapport aux éditions précédentes, qui encourage le syndicat à approfondir cet engagement pour l’imposer dans le calendrier social de l’établissement.

Une stratégie axée sur l’égalité…

Plutôt que de se contenter de l’index d’égalité femmes-hommes (issu de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018), le syndicat décide de plancher sur un index à la fois simple mais plus exigent, puisqu’il prend notamment en compte la question des emplois précaires. En place depuis 2022, cet « index Cgt » conclut à un score d’environ 70/100 alors que, selon l’index institutionnel, le Brgm obtient un score de 93/100. « La question de l’égalité professionnelle est un sujet qui, historiquement, est plutôt associé à la Cfdt qu’à la Cgt, constate Christophe Innocent. Cependant, au Brgm, c’est désormais l’inverse et on se rend compte que, probablement grâce à cela, notre syndicat attire plus de jeunes et de femmes qu’avant. »

… et les salaires, pour des augmentations générales

Autre cheval de bataille, les salaires. « C’est le résultat d’une longue histoire mais, au Brgm, les rémunérations sont 10 à 15 % inférieures à celles des autres Epic de recherche », dénonce Christophe Innocent. Peu avant le confinement, pour rattraper les salaires les plus faibles, une commission ad hoc, réunissant direction des ressources humaines et représentants du personnel, a été mise en place pour, chaque année en septembre, étudier des demandes de réévaluation. «  La Cgt a porté une grosse trentaine de dossiers, soit les deux tiers des demandes de revalorisation  », relate le délégué syndical. Au point que le message circule dans l’établissement : « va voir la Cgt ! »

Quant à la revalorisation générale des salaires, devenue depuis trois an un thème de revendication intersyndicale, Christophe Innocent estime que pétitions et lettres à l’attention de la direction et des ministères de tutelle ne suffisent plus. « Juste avant les dernières élections, la Cgt a appelé à un débrayage d’une heure. Cet appel a été bien suivi, relate-t-il. Cela signifie qu’il y a une place pour un syndicalisme plus combatif et que, peut-être, nous nous bridions un peu, finalement. Désormais, on ne s’interdit plus d’appeler à la grève. » Là encore, les jeunes sont demandeurs, estimant parfois que la Cgt n’est encore pas assez combative, constate-t-il. « Nos jeunes collègues ont, par ailleurs, un niveau de conscience bien plus élevé que les anciens sur les questions climatiques et sur les questions d’égalité. Ce sont des aspirations qu’il faut entendre et porter. L’avenir de la Cgt est là », projette Christophe Innocent.

Des adhérents en hausse et actifs

Parallèlement à une audience électorale croissante, la Cgt gagne aussi des adhérents au fil des mois. «  Nous ne sommes pas très nombreux, reconnaît le délégué syndical : un peu plus d’une quarantaine désormais, dont neuf nouveaux adhérents depuis l’automne dernier.  » Une dynamique encourageante qui s’accompagne, en outre, d’un fort engagement militant. « C’est assez exceptionnel, mais au moins 50 % des adhérents sont aussi des membres actifs. On est tous multitâches. » Et il faut bien cela pour, sans droit syndical spécifique, espérer couvrir tout le territoire.