Platines – À l’amour comme à la mort

La soprano allemande Katharina Ruckgaber embrasse, avec une espièglerie détonnante, des mélodies d’un registre plutôt sombre. Enthousiasmant.

Édition 027 de mi-mars 2023 [Sommaire]

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Retour sur Love and let die paru en fin d’année dernière. Au-delà du jeu de mots et de la référence à James Bond, Katharina Ruckgaber a voulu sonder nos instincts les plus violents et notre fascination pour le morbide à travers 21 mélodies et 17 compositeurs, tous de langue allemande sauf deux, le Hongrois Franz Liszt et l’Italien Luciano Berio. Et le résultat est à proprement parler… réjouissant  !

Accompagnée au piano par Jan Philip Schulze, la soprano d’origine munichoise chante le dépit amoureux, la mort, la trahison, avec une légèreté et un humour qui n’ont d’égal que le plaisir de la découverte de grands oubliés de l’histoire. Ainsi Bruno Walter, connu pour ses interprétations inoubliables des symphonies de Mahler, mais ignoré en tant que compositeur  ; Georg Kreisler, chansonnier dans la pure tradition du cabaret berlinois  ; Joseph Marx, chef de file de la musique tonale autrichienne dans les années 1930, dont la musique célèbre la nature et le rêve, à l’instar de son lied Und Gestern hat er mir Rosen gebracht, au lyrisme délicat, et où le piano enveloppe littéralement le chant. Que ce soit dans les pièces classiques (Die Männer sind méchant !, de Schubert) ou plus contemporaines, Katharina Ruckgaber montre toute l’étendue de son registre vocal et son art de la théâtralité.

Dans des tons différents  : léger (Mach’s Dir bequem, Lotte, de Kreisler)  ; espiègle (Mahnung, d’Arnold Schönberg)  ; fantastique et sensuel (Begegnung, de Hugo Wolf)  ; crépusculaire et apaisant (Geflüster der Nacht, d’Alexander von Zemlinsky). Sans oublier Sequenza III, de Berio, où sa plasticité vocale, étonnante, alternant parlé-chanté, rires, hauteurs de tons, intensités expressives, élans poétiques, ne finit pas d’impressionner.

  • Katharina Ruckgaber, Jan Philip Schulze (p.), Love and let die, 1 Cd Solo Music, 19 euros.