La lutte contre les risques psychosociaux peut désormais s’appuyer sur la la norme Iso 45 003, fixée par l’Organisation internationale de normalisation. Mais la Confédération européenne des syndicats ne veut pas s’en contenter.
Un instrument comme celui-ci, jusqu’ici, l’Organisation internationale de normalisation (Oin) n’en disposait pas. C’est fait. Depuis le début de l’été, les entreprises « de toutes tailles et de tous secteurs » du monde entier disposent de la norme Iso 45 003, qui offre des « lignes directrices » pour prévenir « les accidents du travail et les problèmes de santé de leurs travailleurs ainsi que promouvoir le bien-être au travail ». Les dizaines de pages encadrant cet outil distillent une multitude d’informations sur la manière de repérer les risques psychosociaux, de les évaluer et de s’en prémunir.
Elles proposent aussi des exemples d’actions « efficaces » pour avancer. La norme Iso 45 003, résume Scott Steedman, directeur des normes chez Bsi, organisme britannique de normalisation engagé au sein de l’Oin, est « un consensus de bonnes pratiques pour les organisations du monde entier » qui assurera à tous « un résultat gagnant-gagnant ».
Et le rôle des syndicats dans la normation ?
Alors que, dès le début de la pandémie, l’Organisation internationale du travail avait alerté des risques que la crise sanitaire faisait peser sur la santé mentale des travailleurs, la production d’un tel outil est positive. Sauf que sa simplicité alerte sur ses limites. Peut-on se prémunir contre le stress, l’épuisement et la souffrance au travail en se limitant à de « bonnes pratiques » ? En négligeant les antagonismes qui peuvent exister entre exigence des employeurs et revendications des salariés ?
Le mouvement syndical européen, en tout cas, préfère rester prudent. Selon lui, la mise en œuvre de la norme Iso 45 003 pâtit d’une faiblesse incontestable : d’abord, elle passe par pertes et profits les services « santé et sécurité au travail » en entreprise. Plus encore, insiste Isabelle Schömann, secrétaire confédérale de la Confédération européenne des syndicats (Ces), elle néglige le rôle central des syndicats et des parties prenantes de la société dans la normation. Et, à travers eux, elle oublie le rôle des législations nationales ou des conventions collectives dans la protection des salariés.
Plutôt une directive européenne
Considérant que ses membres « ont besoin d’outils qui peuvent les aider à protéger la santé mentale », la Confédération syndicale internationale considère qu’elle ne peut se contenter de la norme Iso 45 003. Et elle l’a annoncé au début de l’été : la campagne pour l’adoption d’une directive européenne dédiée aux risques psychosociaux va redoubler d’intensité. Avec Eurocadres et plus de vingt syndicats nationaux, elle est décidée à obtenir une directive qui, si elle laisse aux États le choix des moyens d’agir, les liera aux objectifs fixés.
Plus encore, une directive européenne contribuera à faire pression sur les employeurs pour les contraindre à respecter la législation. Et la Ces a des arguments pour cela. Pour commencer, seuls quelques États membres disposent d’une législation claire sur les risques psychosociaux. Ensuite, toutes les recherches produites par l’Union européenne démontrent précisément que la principale raison pour laquelle les employeurs gèrent la santé et la sécurité au travail est qu’ils y sont contraints par la loi : ils le disent eux-mêmes, à 89 %. Il faut donc d’urgence que l’Europe les pousse à combler ce vide.
Le coût exorbitant des risques psychosociaux
En 2013, l’Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail avait évalué le coût annuel des risques psychosociaux à 617 milliards d’euros, soit quatre fois le budget de l’Union européenne. Sur cette somme, 272 milliards d’euros étaient imputables à l’absentéisme, 242 milliards à la perte de productivité, 63 milliards aux frais de santé supplémentaires, 39 milliards au versement des allocations versées pour inaptitude. Combien aujourd’hui ?
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