Platines – Au piano, des Préludes hors du temps

Chopin avait conçu ses Préludes comme des improvisations ; le pianiste Jean-Nicolas Diatkine les appréhende comme un tout, alliant poésie, lyrisme et profondeur avec une pudeur et une vision incarnée.

Édition 040 de fin novembre 2023 [Sommaire]

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Il y a des compositeurs et des œuvres qui apparaissent comme des Everest pour certains interprètes, même accomplis. La relation entretenue par Jean-Nicolas Diatkine à Frédéric Chopin n’est pas tout à fait de cette nature, mais longtemps le pianiste, fils du psychiatre et psychanalyste René Diatkine, a eu le sentiment que l’auteur des Polonaises le fuyait. Comme Dinu Lipatti, incomparable interprète de Chopin, Jean-Nicolas Diatkine se plonge tout entier dans une partition pour en saisir l’écriture et les émotions profondes.

Écrite peu avant la rupture du compositeur avec George Sand, la Sonate n°3 op.58 est une page pleine de vie : derrière chaque arpège de l’allegro initial, il y a l’expression d’une infinie tendresse ; le volubile scherzo qui suit se fond en une douce rêverie (largo) ; avant un finale dominé par un sentiment d’exaltation.

Beethovénien convaincu, Diatkine ne se laisse jamais déborder par un sentimentalisme excessif ni un alanguissement facile. Il allie poésie, lyrisme et profondeur avec une pudeur et une vision incarnée, que l’on retrouve dans les 24 Préludes. Conçus par Chopin comme des improvisations, le pianiste les appréhende comme un tout, recréant un univers chamarré et tourmenté, imagé et instable. Un parcours hanté dont les fantômes inspireront jusqu’à Serge Gainsbourg (Jane B sur le prélude n°4) ou Barry Manilow (Could it be Magic, sur le prélude n°20).

  • Jean-Nicolas Diatkine, Chopin. Sonata n°3 op.58, Complete Preludes, 1 Cd Solo Musica, 16 euros.