Mois des fiertés : la Cgt mène la lutte avec les travailleurs Lgbtqi
Juin est le mois des fiertés LGBTQI. Dix ans après l’adoption en France du mariage pour tous, la lutte contre les LGBTQIphobies reste d’actualité, y compris à la Cgt où la conquête de ces droits s’inscrit dans une démarche volontariste.
Le 16 mai, à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre les Lgbtqiphobies, l’association Sos Homophobie a publié son rapport annuel d’évaluation, allant des agressions physiques aux discriminations dans la sphère professionnelle, avec 101 cas signalés au travail (rejet, insultes, harcèlement…). La Cgt traite ce sujet depuis la fin des années 1990. Un collectif confédéral a vu le jour en 1999 et la Cgt prend part aux marches des fiertés depuis le milieu des années 2000.
Pour quel résultat ? La revue Travail, genre et société, animée par des universitaires, a récemment publié un numéro entièrement consacré aux Lgbtqi dans le monde du travail. Dans un des articles, la chercheuse en Science politique Estelle Fisson analyse les modalités et les obstacles de la prise en compte des discriminations faites aux personnes Lgbt par les syndicats en France, dont la Cgt. Cette dernière livre une analyse plutôt positive de son action : « Ce n’est pas que de l’affichage, il y a un vrai travail et un vrai suivi du sujet. » Selon elle, la Cgt est d’ailleurs la première organisation professionnelle à se positionner sur ces questions et parvient à imposer son style.
Un syndicat mobilisé pour le mois des fiertés
Cet engagement se concrétise notamment par sa participation aux marches des fiertés, une des actions les plus visibles. Concentrées en juin, elles se déroulent de mai à août, dans les grandes villes de France comme Lille, Bordeaux, Nantes, Toulouse, Lyon ou encore Paris.
La participation de la Cgt à ces manifestations est plutôt bien accueillie. À Paris, elle s’implique avec une volonté de combiner le festif et le revendicatif, en distribuant tracts et goodies. Il y a cependant un bémol. Estelle Fisson relève qu’en fonction de son adhésion ou non aux mots d’ordre choisis par les organisateurs, la Cgt est plus ou moins bien placée dans le cortège.
Ce problème est moins présent dans les marches du reste de la France. La Cgt a d’ailleurs édité un kit à destination de l’ensemble des unions départementales, pour leur donner le mode d’emploi d’une participation aux marches des fiertés. Ce kit comprend notamment le calendrier répertoriant les manifestations dans toute la France, ainsi qu’un bon de commande pour obtenir le matériel adapté : les célèbres drapeaux arc-en-ciel, les autocollants et les tee-shirts.
Cette stratégie semble payante : « Entre 2019 et 2022, la Cgt est passée d’une participation de 30 à 56 marches des fiertés », révèle Camille Hecquet, responsable des questions Lgbtqi à l’espace revendicatif. Mais il reste des territoires à mobiliser : « Certaines unions départementales ne sont pas encore intéressées, remarque-t-elle. Nous devons les convaincre et les former pour qu’elles puissent elles aussi coorganiser ces marches. »
Des accords d’entreprises plutôt que des « chartes »
Ce travail de formation est l’une des activités du collectif confédéral. Au cours des dernières années, plusieurs sessions ont été organisées pour sensibiliser les militants aux problématiques spécifiques rencontrées par les travailleuses et travailleurs Lgbtqi. Pour Estelle Fisson, la Cgt fait le lien entre lutte des classes et questions Lgbtqi. « Les discriminations sont clairement affichées comme un outil du patronat », explique t-elle.
Dans les entreprises aussi, le sujet est parfois abordé au travers de « chartes ». De nombreux employeurs choisissent d’afficher une relative inclusion grâce à ces chartes non contraignantes. S’il s’agit souvent d’une première étape et d’une prise de conscience, ces initiatives sont jugées insuffisantes. « Notre rôle est plutôt de signer des accords d’entreprise contraignants », tranche Camille Hecquet. L’objectif est de prévenir, en mettant en place des « discriminomètres » et des indicateurs d’inclusion afin de rendre l’espace de travail davantage sécurisant.
On ne peut pas parler de pinkwashing
La Cgt mise aussi sur la lutte collective en réclamant par exemple l’installation de cabines individuelles en lieu et place de vestiaires collectifs, afin de les rendre plus inclusifs, notamment pour les personnes trans. Elle privilégie la voie juridique pour aider les personnes Lgbtqi au travail, et accompagne les victimes en justice. Parfois, le syndicat coopère avec les associations d’entreprises : « Nos élus ne sont pas forcément formés à ces problématiques mais ils et elles ont des compétences syndicales », précise Camille Hecquet.
Si Estelle Fisson assure que les syndicats, et notamment la Cgt, ne peuvent être taxés de pinkwashing (progressisme de façade), tout n’est pas parfait. La problématique n’est pas toujours la priorité des élus Cgt. Certains hiérarchisent encore les sujets, minimisant cette thématique qualifiée parfois d’« individuelle ».
Les syndicats interpellés en troisième recours
Les salariés ne saisissent pas non plus automatiquement les syndicats sur cette question. Ils se tournent en premier lieu vers les associations, en second lieu vers les avocats. Difficile pour les syndicalistes de les défendre, si les principaux concernés ne leur font pas confiance. Les syndicats sont d’ailleurs absents du volet travail dans le dernier rapport de Sos-Homophobie.
« La Cgt reste machiste à certains endroits. Le combat n’est pas encore gagné. Il faut donc déconstruire les idées virilistes, ainsi que les clichés Lgbtqiphobes dans l’inconscient collectif. Cela ne peut pas engager uniquement les personnes Lgbtqi. Tout le monde est concerné par cette lutte », ajoute Camille Hecquet.
Les remontées associatives témoignent d’une croissance des actes et discours anti-Lgbtqi. Si Le rapport 2023 de Sos-Homophobie pointe une augmentation inquiétante des agressions physiques, en hausse de 28 % en une année, les chiffres restent largement en deçà de la réalité selon les responsables de l’association. Il reste donc du chemin à parcourir. Une raison de plus pour les militants Cgt de participer aux marches des fiertés partout en France, notamment le 24 juin à Paris.
Remaniement des commissions
Au sein de la Cgt, chaque mandature voit son lot de réorganisations. Actuellement, une quinzaine de commissions travaillent les sujets sur lesquels la Cgt veut agir. La thématique Lgbtqi est désormais traitée par la commission Discriminations et égalité des droits, qui est également chargée des libertés individuelles, de la citoyenneté, de la laïcité, de la démocratie, des discriminations syndicales et de la lutte contre le racisme. Elle est pilotée par Cécile Velasquez et Damien Pagnoncelli, et Céline Verzeletti en est la référente au bureau confédéral.
Ce site utilise des cookies pour améliorer votre expérience lorsque vous naviguez sur le site web. Parmi ces cookies, les cookies classés comme nécessaires sont stockés sur votre navigateur car ils sont essentiels au fonctionnement de fonctionnalité...
Les cookies nécessaires sont absolument essentiels pour que le site web fonctionne correctement. Cette catégorie ne contient que des cookies qui garantissent les fonctionnalités de base et les fonctionnalités de sécurité du site web.
Ces cookies ne stockent aucune information personnelle.
Les cookies déposés via les services de partage de vidéo ont pour finalité de permettre à l’utilisateur de visionner directement sur le site le contenu multimédia.
Ces cookies nous permettent d’obtenir des statistiques de fréquentation de notre site (ex : nombre de visites, pages les plus consultées, etc.).
Toutes les informations recueillies par ces cookies sont anonymes.