Les élus Cgt du Cse ont noué un partenariat avec un maraîcher de la région grenobloise pour proposer aux salariés des paniers bio. Explications de la démarche.
À l’origine, il y a la motivation d’un élu Cgt « très sensible à la problématique environnementale ». Il y a aussi l’échec financier d’une plateforme de services à destination des salariés, la « conciergerie », très coûteuse et peu utilisée sinon par les cadres. Nous sommes à 25 kilomètres de Grenoble (Isère), direction Chambéry (Savoie), chez Soitec, entreprise qui fabrique des plaquettes de silicium pour supports de puces électroniques (1 400 salariés) et dont le comité social et économique (Cse) propose aux salariés des paniers bio de fruits et légumes produits par un maraîcher local. « Le jour d’après ? On ne changera rien si on ne parvient pas à articuler combats environnementaux et luttes sociales », fait observer Fabrice Lallement, délégué syndical Cgt. En voici une illustration.
Un combat qui ne se mène pas sans difficulté. C’est d’abord une première expérience qui tourne court avec une start-up lyonnaise finalement rachetée en janvier 2020 par Carrefour : « Ce partenariat n’était plus acceptable », souligne l’élu. Ce sont aussi des problèmes d’organisation et un long travail pour convaincre les récalcitrants et leur faire accepter la démarche. « A priori, les salariés ne demandent pas tous à avoir accès à du bio. En revanche, ils se disent attachés au respect du rythme des saisons, à la variété et à la qualité des produits, à des prix raisonnables », poursuit Fabrice Lallement. D’où l’idée d’un circuit court avec une initiative valorisant autant que possible le local. Un partenariat est noué avec un maraîcher qui a repris la ferme familiale et peut proposer des produits pour la plupart cultivés dans le Grésivaudan, l’une des vallées de l’Isère, à proximité de l’entreprise. C’est dès 2018 que le contact est pris avec Davy Rucat, le maraîcher.
Opérateurs, ingénieurs et cadres : tous intéressés !
Plusieurs organisations ont été testées, notamment en mode Amap (association pour le maintien d’une agriculture paysanne) : trop complexe. Une solution s’est finalement imposée en raison de sa souplesse et de son mode de fonctionnement autonome. Une armoire réfrigérée composée aujourd’hui d’une quarantaine de casiers contenant les paniers, payables par carte bancaire et accessibles aux sous-traitants, est installée dans l’un des établissements de l’entreprise, à proximité du local syndical Cgt. En temps réel, le maraîcher reçoit sur son téléphone l’état de remplissage de l’armoire, qu’il peut recharger lorsque c’est nécessaire. Au cœur de la crise sanitaire, une douzaine de paniers en moyenne étaient ainsi récupérés tous les jours.
Pour quel coût ? Le Cse utilise une partie de son budget pour financer le service et le rendre accessible à tous les salariés de l’entreprise, soit un tiers d’opérateurs, autant d’ingénieurs et de cadres. Sa participation a été établie à 3 euros pour les paniers vendus à 5,50 euros et à 5 euros pour ceux à 13 euros. Parce que les élus sont parvenus à convaincre la direction de l’utilité de l’initiative et de son acceptation par les salariés, cette dernière abonde le budget du Cse (entre 10 et 15 millions d’euros) pour contribuer au financement de l’opération.
Une initiative clairement revendicative
Contrairement au système antérieur de « conciergerie », c’est un succès. Aussi bien auprès des cadres ou des ingénieurs que des opérateurs. « Accessible 24 heures sur 24, l’armoire réfrigérée tourne quelle que soit l’heure, y compris la nuit alors qu’il n’y a quasiment que de la production », souligne ainsi le délégué syndical. Ce n’est certes pas juste en proposant des paniers bio que la Cgt mène ses combats. Fabrice Lallement resitue l’initiative du Cse dans une stratégie syndicale plus globale : « Avec 50 % de représentativité, trois délégués syndicaux dont un dans chaque collège, nous avons progressivement construit l’image d’un syndicat équilibré du point de vue des “curseurs” revendicatifs. Les paniers bio en font partie. Pour les salariés, c’est clairement la Cgt qui a convaincu de basculer sur un nouveau modèle. » Un système vertueux, en croissance constante, qui pourrait désormais essaimer dans d’autres entreprises, comme chez STMicroelectronics, au carrefour de trois massifs montagneux, sur un territoire plus vaste.
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