Chronique européenne -  Élections européennes, J+20

Par Nayla Glaise, présidente d’Eurocadres

Une campagne marquée par la violence, la désignation de migrants comme boucs émissaires, la menace d’austérité et la montée de l’extrême droite ont donné des résultats mitigés dans tous les États membres.

Édition 053 de [Sommaire]

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Bien que ce week-end marque le début de deux semaines d’agitation dans toute l’Europe à l’occasion du scrutin en France, les élections législatives anticipées n’ont pas été l’unique préoccupation de ceux qui se trouvent à Bruxelles en cette fin de mois de juin. Mais nous le savions tous. 

Après les élections européennes, le marchandage pour les postes clés nous a laissés avec davantage de rumeurs que de certitudes. Il semble de plus en plus probable qu’Ursula von der Leyen obtienne le soutien du Conseil pour un second mandat à la présidence de la Commission. En outre, l’ancien Premier ministre portugais, Antonio Costa, pourrait recevoir le feu vert des États membres pour la présidence du Conseil alors que l’ancienne Première ministre estonienne, Kaja Kallas, serait pressentie pour le poste de haut représentant pour les affaires étrangères (le chef de la diplomatie de l’UE). 

Si aucune opposition n’a été constatée contre M. Costa ou Mme Kallas, le Parlement européen pourrait représenter un défi pour Mme von der Leyen, dont les soutiens se sont effrités dans tous les domaines par rapport à la première moitié de son mandat. Avec son soutien unilatéral à Israël à son flirt avec l’extrême droite, la candidate du PPE est confrontée à des réactions négatives de la part de la gauche, du S&D, des Verts et de certains groupes politiques de droite. Tout cela, en dépit de chiffres qui jouent en faveur du PPE… 

Virage à droite sur les questions économiques et sociales

Bien que les élections ont eu lieu le 9 juin, le résultat final ne sera connu que lorsque les membres élus et leurs délégations décideront des groupes politiques avec lesquels ils siègeront (l’AfD et le Fidesz en sont les principaux exemples). Cette année a sans aucun doute vu une augmentation de la part de voix des partis d’extrême droite. L’idée que le centre « tient » est liée au fait que les politiciens ignorent comment le centre de l’Europe a viré à droite sur les dossiers économiques et sociaux. 

Une campagne marquée par la violence, la désignation de migrants comme boucs émissaires, la menace d’austérité et la montée de l’extrême droite ont donné des résultats mitigés dans tous les États membres. De toute évidence, la diminution du nombre de sièges pour le S&D et les Verts a affaibli le bloc progressiste, malgré une légère croissance pour le groupe de la Gauche. Même avec des pertes catastrophiques pour Renew Europe (RE), le cordon sanitaire traditionnel pourrait encore être en place, avec 452 sièges entre le PPE, les S&D, les RE et les Verts, selon une projection au 24 juin. Les décisions sur les groupes n’ont pas encore été finalisées, mais les projections actuelles devraient maintenir l’alliance au-dessus des 361 voix nécessaires à l’adoption d’initiatives législatives. 

Des questions encore sans réponses

Malheureusement, le PPE jouera le rôle de faiseur de roi tout au long des cinq prochaines années, son augmentation à 189 sièges signifiant qu’il occupera presque certainement des positions puissantes au sein des commissions, tout en ayant la taille nécessaire pour faire passer ses priorités. 

Ce qui est incertain, c’est la manière dont le groupe interagira avec ceux qui l’entourent. Si le cordon sanitaire traditionnel a tenu, les sondages du PPE concernant le groupe ECR de Giorgia Meloni n’ont pas été positifs. Le groupe libéral RE centriste d’Emmanuel Macron a été décimé, perdant des sièges dans toute l’UE et sa délégation tchèque, ce qui signifie que l’ECR est maintenant (actuellement) le troisième plus grand groupe parlementaire. Ni Mme von der Leyen ni Manfred Weber n’ont exclu la possibilité d’obtenir davantage de commissions dans les domaines de l’ECON (affaires économiques et monétaires) et de l’AGRI, ou d’établir des schémas de vote avec le PPE. 

Jusqu’à ce que les lignes de bataille soient tracées, y compris avec les votes sur le président de la Commission et les délégués des commissaires, les accords d’arrière-boutique pourraient déterminer l’orientation du Parlement européen pour cette législature.

Prochaines étapes pour les syndicats

Alors que le fonctionnement du Parlement deviendra certainement plus difficile pour les syndicalistes, notre travail pour atteindre ceux qui soutiennent notre cause a déjà commencé. 

Depuis les élections, nous avons dressé la liste des députés européens, des questions et des rôles susceptibles d’apporter les changements souhaités par les travailleurs. 

Le mois prochain, nous serons à Strasbourg pour rencontrer certains des leaders des groupes progressistes pour la prochaine législature, afin de déterminer leurs priorités et la meilleure façon de représenter les travailleurs. Alors que l’attention se tourne au niveau national vers une élection cruciale, nous continuerons à étudier les permutations dans notre prochaine chronique d’Options.