Le temps métal pourrait se comprendre comme le temps : « de production mesuré sur une journée » ou celui « réellement passé sur les machines »… en clair, le temps réputé efficace. L’accroître devrait ainsi servir à « améliorer la performance des grands processus de l’entreprise » et à « remettre le collaborateur au centre de ces processus ».
Cette volonté d’optimiser le temps des salariés sous-entend quelques présupposés qu’il convient de rappeler.
Il existerait donc un temps non-métal ?
En supposant qu’en moyenne une heure de travail d’un salarié d’EDF se répartit pour moitié en temps métal et pour moitié en temps non-métal, il faut alors se poser la question du contenu de ce temps non-métal. Y trouvons-nous l’accès au lieu de production ? Des tâches administratives réputées improductives ? La pause-café ? Comment déterminer ce qui sert directement à la production d’un bien ou d’un service ?
L’expression « temps métal », et son accroissement en pourcentage, comme, par exemple, passer de 50 %/50 % à 70 %/30 %, contient en elle le risque non pas d’un rééquilibrage à charge égale pour le salarié, mais une nouvelle intensification du travail qui augmenterait, en valeur absolue, la partie métal. Une fois de plus, ce qui sonne comme une évidence sous l’angle de la production, revient en définitive à l’alourdissement de la charge de travail du salarié et ce, de manière pernicieuse, sous couvert de remettre le « collaborateur » au centre du processus (on se demande bien où il était passé jusque-là…).
L’organisation deviendrait secondaire ?
S’agit-il d’une énième opération de com, ou d’une nouvelle considération portée au véritable acteur de la production ? La méfiance doit donc rester de mise, car l’introduction de prétendus nouveaux modes de management dans l’entreprise a déjà engagé le transfert d’un certain nombre de responsabilités de l’employeur vers le salarié. Recentrer sur le salarié revient donc à faire de lui le personnage clef de la production, ce qu’il est, mais en le chargeant de responsabilités qu’il n’a pas à assumer. L’organisation, qui est pourtant de la responsabilité de la hiérarchie, passe ainsi au second plan, car l’individualisation des responsabilités dissout certaines missions normalement attribuées au chef hiérarchique.
Travail supportable
Accroître le temps métal diminue la part dite « improductive », mais c’est elle qui rend pourtant supportable la production. Contrairement à ce que la direction voudrait faire croire, cette part ne relève pas d’une quelconque perte de temps dépensé en actions inutiles. Car la production nécessite tout un environnement de temps et de gestes permettant, in fine, l’accomplissement des tâches quotidiennes. La culpabilisation du salarié sur cette part improductive ne peut que le mettre en tension et dégrader la qualité de sa production. La diminution du temps non-métal risque ainsi d’avoir un effet contre-productif allant à l’encontre de la volonté première recherchée.
Finalement, le temps métal est une notion erronée
Ces dernières années, le temps de travail n’a cessé d’augmenter (forfait jour, heures sup non rémunérées, télétravail, réforme des retraites…). Les employeurs en ont été les grands gagnants, mais ils cherchent, encore à intensifier le contenu même du travail, pour gagner et sur le temps et sur son utilisation. Les salariés, déjà en surcharge permanente, au sein d’une organisation viciée ne doivent pas, une nouvelle fois, payer l’addition. Car ce qui compte, c’est bien le temps passé sous le contrôle de l’employeur.
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