Les discriminations consistent à défavoriser une personne en raison d’un motif prohibés par la loi. Elles constituent des infractions punies tant par le droit pénal que par le droit disciplinaire de la fonction publique.
Le principe de non-discrimination, inscrit dans le statut, découle du principe d’égalité prévu par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Celui dispose : « Tous les citoyens étant égaux à ses yeux [la loi], sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. »
Ainsi, toute distinction ou différence de traitement est interdite si elle est fondée sur l’un des motifs suivants :
l’âge ;
l’apparence physique ;
les caractéristiques génétiques ;
la domiciliation bancaire ;
létat de santé ;
la grossesse ;
le handicap ;
l’identité de genre ;
la langue parlée, c’est-à-dire la capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français ;
le lieu de résidence ;
les mœurs ;
le nom ;
les opinions philosophiques ou politiques ;
l’orientation sexuelle
l’origine
une particulière vulnérabilité liée à la situation économique ;
une perte d’autonomie ;
la race prétendue, l’ethnie, la nationalité : en fonction d’une appartenance ou d’une non-appartenance ;
la religion : c’est-à-dire la croyance ou l’appartenance ou la non-appartenance à une religion ;
le sexe ;
la situation de famille ;
le syndicalisme.
La discrimination est directe lorsqu’elle est nettement visible, voire affichée ou revendiquée. Par exemple, si une offre d’emploi indique que les femmes ayant des enfants ne peuvent pas postuler.
Elle est indirecte lorsque des mesures apparemment neutres défavorisent, de fait, une catégorie de personnes. Par exemple, un calcul de primes qui prendrait en compte une majoration de la rémunération dont l’attribution est conditionnée par l’absence de congés maladie est susceptible de constituer une discrimination indirecte fondée sur l’état de santé.
Au sein de la fonction publique, la discrimination est prohibée par le chapitre 1er du titre III du livre 1er du Code général de la fonction publique, intitulé « Protection contre les discriminations ». Il est composé des articles L. 131-1 à L. 131-13.
Un cadre général du droit de la non-discrimination est, en outre, prévu par la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations,
Par ailleurs, les articles 225-1 à 225-4 du Code pénal définissent les infractions liées aux discriminations, ainsi que les peines applicables à leurs auteurs ou complices.
Des discriminations non délictuelles
Certaines discriminations ne sont pas constitutives d’une infraction et n’engagent pas la responsabilité disciplinaire de leurs auteurs. L’article 2 de la loi du 27 mai 2008, ainsi que l’article 225-3 du Code pénal, apportent en effet des exceptions à ce qu’est une discrimination.
Par exemple, l’article 2, précité, indique que si toute discrimination sur l’accès à l’emploi est prohibée, une telle interdiction ne fait pas obstacle :
à une politique publique de promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes ;
aux mesures prises en faveur des personnes handicapées et visant à favoriser l’égalité de traitement ;
aux mesures prises en faveur des personnes résidant dans certaines zones géographiques et visant à favoriser l’égalité de traitement.
Il convient, toutefois, que l’objectif soit légitime et l’exigence proportionnée.
De même l’article 225-3 du Code pénal précise que ne sont pas constitutives d’une infraction :
les discriminations fondées sur l’état de santé ou le handicap, lorsqu’elles consistent en un refus d’embauche ou un licenciement fondé sur l’inaptitude médicalement constatée dans le cadre des lois portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique ;
les discriminations fondées, en matière d’embauche, sur une exigence professionnelle essentielle et déterminante (et pour autant, que l’objectif soit légitime et l’exigence proportionnée) ;
les discriminations fondées, en matière d’accès aux biens et services, sur le sexe lorsque cette discrimination est justifiée par la protection des victimes de violences à caractère sexuel, des considérations liées au respect de la vie privée et de la décence, la promotion de l’égalité des sexes ou des intérêts des hommes ou des femmes, la liberté d’association ou l’organisation d’activités sportives ;
les refus d’embauche fondés sur la nationalité, lorsqu’ils résultent de l’application des dispositions statutaires relatives à la fonction publique ;
les discriminations liées au lieu de résidence, lorsque la personne chargée de la fourniture d’un bien ou service se trouve en situation de danger manifeste.
Par ailleurs, les mesures prises en faveur des personnes résidant dans certaines zones géographiques et visant à favoriser l’égalité de traitement ne constituent pas une discrimination.
Constat des discriminations dressé par le ministère
Dans une récente réponse du ministère chargé de la Fonction publique à la question d’une députée (1), celui-ci indique avoir été commanditaire, depuis 2016, de quatre testings nommés « Discriminations à l’embauche dans la sphère publique : effets respectifs de l’adresse et de l’origine » (acronyme : Desperado), au sein des trois versants de la fonction publique (hospitalière, territoriale, d’État) (2).
Le testing consiste à faire constater toute forme de discrimination. Cette méthode soumet deux ou plusieurs profils comparables à une même demande – et, dans le cas présent, l’accès à un entretien d’embauche. Les résultats montrent que, pour le recrutement de cadres administratifs, aucune discrimination en raison de l’adresse n’est significative dans aucun des trois versants (séparément ou agrégés). Quant auxdiscriminations en raison de l’origine, elles ne sont caractérisables et caractérisées que dans la fonction publique territoriale.
La fonction publique territoriale discrimine davantage
S’agissant de l’origine, au niveau agrégé de l’ensemble des trois versants, la différence du taux de rappel (ou écart des taux de succès) est de 6,8 points entre le candidat de référence et le candidat supposé d’origine maghrébine. On ne retrouve cet écart lorsqu’on examine séparément la fonction publique d’État et la fonction publique hospitalière.
L’écart n’apparaît significatif que dans la fonction publique territoriale, où celui-ci, où il atteint 8,56 points. Ainsi, il apparaît que les candidats supposés d’origine maghrébine ont 22 % de chances en moins de recevoir une réponse positive par rapport aux candidats de référence.
Pour lutter contre les discriminations à l’embauche dans l’administration publique, le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques prétend actionner plusieurs leviers.
Le label Diversité et Égalité
Tout d’abord, la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (Dgafp) incite l’ensemble des employeurs publics – État, collectivités territoriales et hôpitaux – à s’inscrire dans le plan national de lutte contre le racisme et l’antisémitisme 2023-2026, porté par la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-Lgbt (Dilcrah). Ils pourront, dans ce cadre, candidater au label Diversité et Égalité délivré par l’Association Française de normalisation (Afnor).
Le cahier des charges du label engage les administrations à évaluer et à améliorer leurs procédures et pratiques de ressources humaines à l’aune du principe de non-discrimination. Au 1er mars 2023, 45 administrations ont été labellisées : la totalité des ministères, cinq établissements publics, le Conseil d’État, huit collectivités territoriales et cinq établissements publics de santé.
Sensibiliser les professionnels des ressources humaines
En outre, la Dgafp entend renforcer la professionnalisation des ressources humaines, ce qui implique notamment de sensibiliser et de former l’ensemble des recruteurs publics aux biais de recrutement pour prévenir les discriminations. À cette fin, la Dgafp a diffusé en 2021 un guide, Structurer la fonction recrutement, qui comporte des éléments de sensibilisation des employeurs publics à la non-discrimination. En outre, les membres des jurys de concours sont formés à la prévention des discriminations, aux enjeux de l’égalité professionnelle et aux biais d’évaluation.
Par ailleurs, depuis septembre 2021, une offre de formation interministérielle des jurys de concours est disponible sur la plateforme de formation à distance Mentor, accessible aux agents de l’État, et intègre les enjeux de lutte contre les discriminations et contre les stéréotypes.
Enfin, une offre de formation interministérielle au recrutement a été déployée dans la fonction publique d’État, dans le cadre d’un marché porté par le ministère de la Justice. Le lot « Réussir ses recrutements » est destiné aux professionnels chargés du recrutement et aux managers recruteurs. Au sein de ce lot, certaines formations, qui portent sur les étapes de la sélection et l’analyse des candidatures, ont pour objectif de faire connaître les principes et pratiques de non-discrimination.
Réponse à la question écrite n° 5277, publiée au Journal officiel de l’Assemblée nationale du 30 mai 2023.
Ces testings à l’embauche ont été réalisés par l’équipe du professeur Yannick L’Horty de l’université Gustave-Eiffel, à Marne-la-Vallée.
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