Février s’achève dans la capitale belge, le mois le plus court, mais l’un des plus mouvementés, avec des invités comme le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’adressant aux institutions européennes et une intense action législative. Pour commencer, nous exprimons à nouveau notre soutien continu aux innombrables travailleurs français qui luttent contre la réforme des retraites d’Emmanuel Macron. Votre force est une inspiration pour les syndicalistes en Europe et dans le monde, qui reconnaissent et soutiennent vos actions. Solidarité avec nos collègues !
Le mois s’est ouvert sur une session plénière critique du Parlement européen, avec deux votes décisifs portant sur la directive sur les travailleurs des plateformes et les comités d’entreprise européens.
Le 2 février, le Parlement a ainsi adopté le mandat des commissions de l’emploi pour des négociations en trilogue sur la directive relative aux travailleurs des plateformes. Malgré l’injection d’importantes ressources financières dans la poursuite de leur modèle d’exploitation, les lobbyistes d’entreprises telles qu’Uber ou Deliveroo ont échoué à faire protéger leurs profits. Les députés européens ont en effet plutôt cherché à obtenir des résultats pour les travailleurs. Avec un vote de 376 voix pour, le rapporteur Elisabetta Gualmini (S&D, IT) a réussi à fournir des garanties sur le renversement de la charge de la preuve, mettant fin au faux statut de « travailleur indépendant » pour les travailleurs dans toute l’Union européenne.
Un pas décisif pour les travailleurs de plateformes
Cette position constitue une étape majeure dans la clarification de la relation professionnelle que les travailleurs de la plateforme entretiennent avec leur employeur, et un pas important vers une meilleure protection pour ceux ayant des conditions de travail atypiques. Bien que le texte final présente des lacunes, par exemple en ce qui concerne les critères non obligatoires pour déterminer le statut professionnel d’un travailleur, l’accord constitue un progrès vers l’amélioration de la proposition initiale. Les ajouts sur la transparence des algorithmes et l’interdiction de certaines pratiques à haut risque sont bien en phase avec les principes de la future loi européenne sur l’IA. Les algorithmes utilisés sur n’importe quel lieu de travail, qu’il s’agisse de plateformes ou autres, doivent faire l’objet d’une surveillance humaine et de niveaux de compréhension adéquats pour garantir le respect des droits de l’homme.
Alors que les négociations en trilogue s’avèreront certainement difficiles, l’équipe de négociation du Parlement a déjà montré sa force en obtenant ces victoires. Nous avons toute confiance dans leur capacité à éviter une dilution de la directive. Il s’agit d’une victoire historique contre les conditions de travail précaires pour les citoyens européens.
Les cadres sont pleinement concernés. Si le travail sur plateforme est souvent associé aux grands transports ou à l’artisanat, son importance s’est en effet accrue pour les professionnels et les cadres, notamment dans les domaines dominés par les indépendants ou les travailleurs au statut autrement atypique. Les professionnels et les cadres fournissent de plus en plus leurs services par le biais de plateformes, assumant une série de rôles dans le codage, l’ingénierie et d’autres activités. Comme le souligne une étude d’Eurofound (2018), les services professionnels figurent parmi les activités de travail sur plateforme les plus courantes dans tous les pays européens inclus dans leur analyse.
Vers la révision de la directive sur les Comités d’entreprises européens
Le même jour, les députés européens ont voté en faveur de la révision de la directive sur les comités d’entreprise européens (CEE). Les principaux éléments de cette révision seront de renforcer leur rôle, tout en augmentant leur nombre. Bien qu’elle prévoit une place pour les CEE dans la législation, la directive existante est depuis longtemps critiquée par les syndicats pour son manque de garanties efficaces, qui entravent la capacité de ces organes à fonctionner efficacement. Avec 385 voix pour, les députés ont demandé une augmentation des sanctions en cas de non-respect de la directive, une amélioration de la résolution des litiges, une clarification de la portée des informations confidentielles, des dispositions prévoyant que les entreprises doivent payer les frais juridiques des procédures judiciaires entre le CEE et les employeurs et un accès garanti à la justice.
Avec cette victoire, les syndicats peuvent maintenant attendre que la Commission propose une consultation des partenaires sociaux sur les changements nécessaires à la directive sur les CEE, la suite des travaux devant contribuer à renforcer leur position sur les lieux de travail européens.
La flexibilité du travail : premiers ateliers organisés par Eurocadres
Ce mois-ci a également été marqué par une étape importante dans la coopération syndicale, Eurocadres ayant accueilli à Bruxelles plus de 30 collègues de syndicats nationaux et européens pour notre tout premier atelier consacré au personnel de la communication. Avec plus de 20 syndicats représentés, cet atelier de deux jours nous a donné l’occasion d’analyser comment nos messages atteignent les membres et de partager les meilleures pratiques.
Premier atelier de notre projet sur la flexibilité au travail, cet évènement a jeté les bases d’un examen de l’impact des modalités de travail alternatives sur la capacité du personnel de communication à répondre aux priorités du personnel politique du syndicat.
Répartie sur quatre sessions, la question centrale à laquelle nous avons cherché à répondre était la suivante : « Les travailleurs européens ont été confrontés à de multiples crises qui se chevauchent cet hiver, et pourtant les syndicats ne parviennent souvent pas à s’engager les uns avec les autres sur des questions essentielles. Comment pouvons-nous faire mieux et quelles devraient être nos priorités communes ? »
Alors que la mise en contexte de ces questions a constitué une sorte de séance de thérapie pour le personnel de communication, la mise en œuvre pratique des ressources pour atteindre les objectifs politiques a été examinée dans une série d’études de cas de campagnes, y compris ceux pour lesquels les syndicats se sont mobilisés en ligne et dans la presse pour obtenir des résultats au profit des travailleurs. Dans différents groupes, les participants ont été chargés d’analyser, en mêlant partage de bonnes pratiques et activités interactives, comment une campagne similaire pourrait se déployer au niveau national ou européen, en prêtant attention aux domaines dans lesquels les efforts peuvent éventuellement échouer.
En outre, nous avons eu le plaisir d’accueillir Tom Moylan, professeur à l’Université de Bruxelles et ancien haut fonctionnaire de la DG Communication de la Commission européenne. Dans une présentation de 60 minutes, il a exposé la manière dont la Commission gère sa communication au niveau européen, basée notamment sur les données, et comment les syndicats peuvent atteindre avec succès les personnalités clés des institutions politiques.
Nous avons conclu notre atelier par une session ouverte, en demandant aux participants comment les syndicats peuvent commencer à amplifier le travail effectué par leurs collègues, et en s’interrogeant sur les possibles connexions aux niveaux national et européen. Nous veillerons à ce que la coopération syndicale en matière de communication bénéficie d’un héritage durable à l’avenir.
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