Comment Aix-en-Provence célèbre le Printemps de la BD

C’est, dans la ville de Cézanne, la 19e édition des Rencontres du 9e art, au cours desquelles huit artistes programmateurs donnent le ton d’une manifestation qui, avec plus de trente auteurs invités, témoigne de la vitalité de la création.

Édition 029 de fin avril 2023 [Sommaire]

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La bande dessinée est une passion française. Son marché, pour parler chiffres, demeure florissant , tandis que ses artisans, auteurs et dessinateurs, sont légion et de talents divers dûment reconnus. Si le Festival d’Angoulême devient, chaque année, la capitale provisoire du 9e art, ici et là, dans tout le pays, on ne se prive pas de le célébrer allègrement. Aix-en-Provence, par exemple, organise en ce moment, pour la 19e année consécutive, ses Rencontres du 9e art, soit la bande dessinée et les arts associés.

L’an dernier, ce rendez-vous, dont les organisateurs s’éloignent délibérément du traditionnel salon en s’ingéniant à proposer « un autre regard sur le 9e art »,avait totalisé plus de 46 000 visites. L’édition 2023 associe à la programmation huit artistes de la scène graphique internationale (Olivier Besseron, Jérémie Fischer, Émilie Gleason, Mister Kern, Camille Lavaud-Benito, Yann Legendre, Sergio Mora et Davor Vrankić). Les clés de l’événement leur ont été confiées, à charge pour eux de lancer les invitations et d’inventer des rencontres qu’il serait impossible de provoquer sans eux.

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Mister Kern, à la fois graffeur, street artist et auteur de Bd, s’inscrit dans le courant artistique « semi-réaliste grotesque »

Performances graphiques à plusieurs mains et cartes à jouer

Ils ont invité trente de leurs pairs en vue d’expositions et d’installations inédites en des lieux emblématiques. On prévoit des performances graphiques à plusieurs mains et, en direct, un jeu de 36 cartes à jouer imaginé par Davor Vrankić, sans compter une centaine d’ateliers pour les scolaires et le grand public, des journaux illustrés gratuits, des séances de dédicaces, une Nuit des musées spéciale Bd et des happenings sous forme de rencards donnés à la dernière minute.

Le festival s’enorgueillit d’un village graphique de 350 mètres carrés, sis à la Cité du livre dans la galerie de la Manufacture, au 10, rue des Allumettes. C’est là que cinq des artistes programmateurs pourront déployer toute l’ampleur de leur talent, tandis que trois autres s’exposeront respectivement au musée des Tapisseries (28, place des Martyrs-de-la-Résistance), dans le jardin de l’atelier Cézanne et dans la galerie de l’office de tourisme.

Il est impossible ici de traiter de tous les artistes en jeu. Nous en privilégions deux. De chacun, nous publions une image. En ouverture de notre texte, il s’agit d’une œuvre de Mister Kern, l’un des huit programmateurs, qui est tout à la fois peintre, graffeur, street artist,auteur de bandes dessinées. Il peut exécuter de grandes fresques à la brosse et non à la bombe, ce qui lui permet de mélanger les couleurs.

Stéphane Trapier dessine régulièrement pour Fluide glacial, mais aussi Télérama et Le Monde.

Certaine bande dessinée violemment caustique, voire libertaire

Il s’inspire volontiers de grands maîtres, de Rubens à Raphaël, en passant par Vélasquez et cet autre espagnol, Joaquín Sorolla (1863-1923) si peu connu en France. Son imagerie de facture classique est formidablement détournée, dans le style d’une certaine bande dessinée violemment caustique, voire libertaire, dont les représentants les plus familiers sont Jean Solé et Gotlib.

Mister Kern prend un malin plaisir à mettre en boîte la politique, la malbouffe, les réseaux sociaux… «  Tout m‘est source d’inspiration, déclare-t-il, je tire profit de tout ce que j’observe et vis. Lorsque je peins en extérieur, par exemple, la pluie donne une espèce de mélange, des coulures… on dirait que les sujets pleurent  ».

En fin d’article, nous avons choisi une image de Stéphane Trapier, qui revisite à loisir les scènes mythiques de films anciens. En 2021, en plein confinement, il installait sur les colonnes Morris du centre-ville d’Aix, sous le titre Cinépresque, quatorze dessins en grand format reprenant autant de classiques du 7e art rems à la sauce thématique du moment, du télétravail au couvre-feu… Cela fit un livre, depuis épuisé.