Édition 048 - début avril 2024

L'ÉDITORIAL

Vu d’Europe — Deux victoires du mouvement syndical !

Ces deux textes, qui représentent des victoires massives pour le mouvement syndical, n’ont plus qu’à être ratifiés par le Parlement européen pour entrer en vigueur. Les dispositions relatives à la gestion algorithmique et aux risques psychosociaux – prévues dans le texte sur les travailleurs des plateformes – complètent ainsi l’application de normes aux entreprises dans le dossier sur le devoir de vigilance, même si le nombre d’entreprises concernées a été réduit par le compromis édulcoré. Quoi qu’il en soit, l’existence de ces deux textes est une manière surprenante et fantastique de commencer ce mois ! 

En mars également, Eurocadres a représenté les cadres européens au sommet social tripartite. Soulignant la nécessité de donner aux travailleurs les moyens de saisir les opportunités offertes par l’Europe, nous avons répondu au thème  : « Un marché unique au service des entreprises et des travailleurs ». Notre contribution s’est concentrée sur le rejet de l’austérité, l’investissement dans les services publics, la fin de la privatisation des industries essentielles, mais aussi l’engagement en faveur de normes sociales et environnementales strictes. Nous avons également insisté sur la nécessité des technologies vertes, de l’amélioration des compétences et de l’action contre les clauses de non-concurrence. En présence de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, du président du Conseil, Charles Michel, du vice-président de la Commission, Dombrovskis, du commissaire Schmit, du Premier ministre belge, Alexander De Croo, du vice-premier ministre belge, Pierre-Yves Dermange, et d’autres personnalités, Eurocadres était représenté au sein de la délégation syndicale. 

Partout en Europe, le retour de l’austérité

Les Européens sont confrontés à un retour de l’austérité qui ne ferait qu’accélérer la polarisation et l’extrémisme, aurait un impact négatif sur nos transitions jumelles et décimerait les familles de travailleurs. Les données de la Banque mondiale montrent, qu’en 2008, les Européens gagnaient 10  % de plus que les Américains. Quatre ans plus tard, en 2022, nous accusons 26  % de retard sur nos homologues d’outre-Atlantique. Ce n’est qu’en finançant les services sociaux, les technologies vertes et la formation continue que nous pourrons combler ce fossé. Nous avons argumenté, auprès des représentants des institutions comme de l’ensemble des partenaires sociaux, sur le fait que la compétitivité exigeait des normes sociales et environnementales, un abandon de l’austérité et un investissement dans le travail. À cet égard, un investissement adéquat dans les services sociaux est essentiel.

Par ailleurs, nous avons poursuivi notre action contre les clauses de non-concurrence. Abordées par les Américains, elles ne le sont pas au niveau de l’UE, bien qu’elles soient en contradiction directe avec le traité sur son fonctionnement. Si ces clauses ne sont souvent pas applicables, elles peuvent avoir un impact psychologique qui entrave la mobilité des travailleurs. Cela signifie que l’utilisation illégale de ces clauses nuit aux salaires, à l’innovation et à l’économie européenne dans son ensemble, puisque plus de 20 millions d’Européens sont soumis à ces pratiques. Tant que ces points ne seront pas traités de manière adéquate, nous sommes convaincus que les travailleurs ne disposeront pas des outils nécessaires pour mener à bien nos deux transitions. 

Loi sur l’IA  : quel impact sur les lieux de travail  ?

Direction Bilbao. Ce mois-ci, nous y avons débattu de la loi européenne sur l’IA et de l’impact de la numérisation sur les lieux de travail européens. Cofinancé par le gouvernement basque, notre évènement intitulé « L’intelligence artificielle sur le lieu de travail  : Quelle est la prochaine étape pour la protection des travailleurs européens ? » a bénéficié des contributions de nombreuses personnalités et experts. Il visait à souligner comment les négociations collectives, les accords sectoriels et, en fin de compte, la législation européenne doivent être mis en place pour garantir que les gouvernements nationaux et les autorités du travail utilisent les meilleures pratiques pour protéger les travailleurs contre les défis posés par l’IA.

Avec des gouvernements comme celui du Pays basque, proactifs dans la gestion de ces risques émergents, nous pouvons nous appuyer sur un large éventail d’expériences pour fournir aux cadres des politiques qui équilibrent la productivité et les dispositions adéquates en matière de santé et de sécurité. Dans son intervention d’ouverture, Idoia Mendía Cueva, ministre du Travail et de l’Emploi du gouvernement basque, a souligné la nécessité de s’adapter pour garantir des résultats équitables, « exclure de nouvelles lacunes et garantir l’intégrité des travailleurs, leur santé, leur bien-être et leurs droits ». L’enregistrement complet de l’évènement est disponible ici.

Nous avons également salué le retrait des badges des lobbyistes d’Amazon du Parlement européen, après les appels décisifs de la Commission de l’emploi contre le manque de disponibilité, de transparence et de bonne foi de la multinationale vis-à-vis des eurodéputés. Si cette mesure permet de responsabiliser les entreprises qui ne font pas preuve de respect envers les élus (et les citoyens européens), elle envoie également un message  : quelle que soit la taille de l’entreprise, les normes fixées par l’Union européenne, en effet, l’emportent.