La perte d’autonomie est essentiellement liée à des problèmes de santé. Son financement doit donc relever d’une prise en charge par la Sécurité sociale.
Créer une seconde journée de solidarité, comme celle mise en place en 2004, pour financer la « dépendance » : trois jours après la proposition formulée par Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, l’idée a été reprise par Emmanuel Macron, lors de son entretien à BfmTv et Mediapart. « C’est une piste intéressante », a-t-il déclaré, qui « peut être une option ». Une « option » que conteste la Cgt, qui dénonce une « mesure socialement injuste ». En s’interrogeant : « La question de la perte d’autonomie intéresse tout le monde. Pourquoi son financement pèserait-il sur les seuls travailleurs ? »
Personne ne nie, en effet, que le vieillissement de la population bouleverse la démographie et fait émerger de nouveaux besoins. Selon l’Insee, à l’horizon 2060, plus de 23 millions de Français auront plus de 60 ans, soit environ une personne sur trois. Voilà pour le contexte. Mais celui-ci est souvent instrumentalisé pour dramatiser la situation, en laissant supposer que les besoins de financement de la perte d’autonomie sont tellement importants qu’il n’y aurait pas d’autre solution, pour y faire face, que de recourir aux assurances privées.
Cela représente « en réalité 0,5 % de Pib »
« Or ce coût, à législation constante, n’est pas insurmontable : s’il se chiffre en milliards d’euros, il représente en réalité 0,5 % de Pib », explique Pierre-Yves Chanu, conseiller confédéral, membre notamment du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Cela n’est pas insurmontable car la perte d’autonomie, qui n’est d’ailleurs pas exclusivement liée à la notion d’âge, n’est pas une fatalité : beaucoup de personnes âgées vieilliront en bonne santé, même si elles ont besoin d’aide. « Il n’y a pas un unique scénario selon lequel on serait actif, puis retraité, puis dépendant », souligne-t-il.
Cela ne veut pas dire qu’un certain nombre de besoins, aujourd’hui mal financés, ne doivent pas l’être. Mais l’instauration d’une deuxième journée de solidarité, en « rapportant » à peine 2 milliards d’euros, ne réglera rien. Emmanuel Macron le sait, en émettant l’idée, dans le même entretien, de la création d’un cinquième risque de la Sécurité sociale. Elle ignore, en outre, le véritable problème qui se pose à tous ceux qui sont concernés : le coût trop élevé de la perte d’autonomie par rapport au niveau des retraites, lorsque la personne se trouve contrainte de partir en institution.
Le coût de l’hébergement « souvent insurmontable »
« C’est l’hébergement qui est souvent financièrement insurmontable, poursuit le conseiller confédéral. Une étude de 2014 a montré que le montant restant à la charge des résidents était de 1 690 euros dans les établissements publics, un montant qui peut atteindre plus de 2 400 euros en Île-de-France. Si bien que “l’option” évoquée par Emmanuel Macron est totalement hors sujet. Elle a pour objet de financer partiellement la perte d’autonomie sans avoir besoin d’augmenter les cotisations sociales » dans le cadre plus global de la Sécurité sociale.
Or, pour la Cgt, c’est parce que la perte d’autonomie est essentiellement liée à des problèmes de santé qu’elle doit, justement, relever majoritairement d’une prise en charge par la Sécurité sociale. Au cours de sa réflexion, elle n’a pas opté pour la création d’un cinquième « risque » à proprement parler, mais d’un cinquième « droit » au sein de la branche maladie, prenant en compte le handicap, de la naissance à la mort, aux côtés de la maladie, de la maternité, de l’invalidité et du décès.
Un « cinquième droit » au sein de l’assurance maladie
Le financement de ce droit nouveau pourrait reposer sur plusieurs éléments, comme le transfert des recettes de l’actuelle Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (Cnsa) et une réforme de l’impôt sur les successions, plus progressif, le tout dans le cadre plus global d’une réforme du financement de la Sécurité sociale : modulation des cotisations « employeurs » en fonction de la masse salariale et des choix de gestion de l’entreprise ; suppression des exonérations de cotisations patronales ; taxe sur les dividendes ; soumission à la cotisation sociale des fonds d’épargne salariale.
Cette conception nouvelle, dans laquelle l’essentiel des coûts de la perte d’autonomie relèverait de la solidarité nationale et non de la solidarité familiale, s’inscrit en outre dans une réflexion plus globale prenant en compte le besoin de nouvelles infrastructures, financées par l’État, la nécessité de repenser l’hébergement en institution ou de revoir les modes de tarification. Avec, notamment, la garantie d’un « reste à vivre » minimal pour tous les résidents en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) : même si d’autres types d’hébergements doivent, également, être développés.
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