Baromètre Ugict-CGT/Secafi : changer de métier ? Un quart des professions intermédiaires et techniciennes l’envisage
L’édition 2022 du baromètre annuel de l’Ugict-CGT/ SECAFI sur les professions intermédiaires et techniciennes montre des professionnels dont les responsabilités et la charge de travail s’accroissent sans que les salaires n’augmentent.
Une sur quatre. Parmi les 1000 personnes interrogées entre le 3 et le 14 novembre 2022 par l’institut Vivavoice pour le 6e baromètre de l’Ugict-Cgt/Secafi, 25 % envisage de changer de travail dans les douze prochains mois. Chez les 30-39 ans, dans le commerce et l’hôtellerie-restauration, elles sont plus nombreuses encore : une sur trois. Leurs motivations sont les suivantes : un meilleur salaire, des perspectives de carrière, un travail qui ait du sens, une meilleure articulation entre vie personnelle et professionnelle.
Déclassement : les fonctionnaires particulièrement touchés
Depuis la création du baromètre Ugict-Cgt/Secafi, la question des salaires n’a jamais été aussi prégnante : 73 % des sondés placent le salaire parmi les trois priorités de leur vie professionnelle, soit une augmentation de 14 points par rapport à la précédente édition ; 91 % des sondés plébiscitent une augmentation collective ; 59 % n’ont eu aucune augmentation depuis un an. Quant à ceux qui en ont obtenu une, celle-ci ne compense pas la perte de pouvoir d’achat liée à l’inflation et le décalage par rapport à leurs responsabilités, leur qualification et leur temps de travail.
Les fonctionnaires sont particulièrement touchés par le déclassement. Comme chaque année, ils sont une large part à estimer que leur salaire n’est pas adapté à leur implication et à leur charge de travail. Ainsi, 74 % des agents du secteur public estiment que leur rémunération n’est pas au niveau de leur implication et 68 % considèrent que leur charge de travail est disproportionnée par rapport au salaire qu’ils perçoivent. Dans le privé, ces chiffres sont respectivement de 60 % et 59 %. « On se retrouve avec des fiches de poste à rallonge et des salaires qui ne suivent pas » résume Matthieu Leguillette, chef d’équipe dans les transports urbains de l’agglomération de Montpellier.
Des responsabilités accrues et un travail moins intéressant
Le temps de travail explose : 53 % des sondés estiment que leur charge de travail a augmenté depuis l’an dernier. Par exemple, 58 % des enseignants du premier degré travaillent plus de 39 heures par semaine. Quant aux moins de 30 ans, 72 % font des heures supplémentaires, qui ne sont bien souvent ni récupérées ni rémunérées. Claire Cazin, technicienne en prévention chez Aéroports de Paris (ADP) explique faire « plus d’heures que ce qui est prévu par (son) contrat. Mais aujourd’hui c’est mal vu de déclarer ses heures supplémentaires. » Le numérique est un vecteur de cette intensification du travail : 63 % des sondés aimeraient bénéficier d’un droit effectif à la déconnexion pour préserver leur vie privée et leur santé.
Les professions intermédiaires et techniciennes sont de plus en plus amenées à faire de l’encadrement : 20 % des sondés sont encadrants, 52 % encadrent ponctuellement. 46 % des sondés voient leurs responsabilités augmenter. Dans le même temps, 36 % d’entre eux considèrent que l’intérêt de leur travail diminue. Cet écart est particulièrement fort chez les enseignants du premier degré : ils sont 47 % à trouver leur travail moins intéressant qu’avant alors que 57 % ont vu leurs responsabilités s’accroître.
Des conflits éthiques lancinants
Pour 63 % des sondés, les choix et pratiques de leur employeur vont à l’encontre de leur éthique professionnelle. Ce chiffre grimpe jusqu’à 72 % pour ceux qui travaillent dans la fonction publique. 35 % des sondés estiment qu’il leur est impossible de fournir un travail de qualité (44 % des agents du secteur public, 30 % des salariés du privé). Isabelle Pugliese, assistante médico-administrative à l’hôpital Trousseau à Paris, explique ainsi : « on choisit de travailler dans le secteur de la santé par vocation. Pour les personnes qui veulent prendre soin des autres, c’est insupportable d’avoir le sentiment de maltraiter les patients. C’est l’une des raisons de la désaffection pour ces métiers. » Dans ce contexte, 62 % des 30-40 ans souhaiteraient disposer d’un droit d’alerte.
L’écart de salaire hommes-femmes continue de se creuser
A responsabilités et qualifications équivalentes, les professions féminisées sont moins bien payées. L’écart de salaire entre hommes et femmes, qui était déjà de 25 %, continue de se creuser du fait de l’inflation et de la faiblesse des augmentations. Les femmes obtiennent moins souvent d’augmentation. Parmi les 59 % de sondés qui n’ont pas été augmentés depuis un an, 61 % sont des femmes et 55 % des hommes. Et quand des femmes obtiennent malgré tout des augmentations, elles sont moins élevées que celles des hommes.
Face aux résultats de ce baromètre, l’Ugict-Cgt porte différentes mesures pour la reconnaissance des professions intermédiaires et techniciennes. L’Ugict-Cgt considère que les professions féminisées doivent être revalorisées, les salaires indexés sur l’inflation, les qualifications et responsabilités exercées reconnues. Il est également nécessaire de mieux articuler les temps de vie, en commençant par rémunérer ou récupérer les heures supplémentaires, en réduisant le temps de travail, en limitant le plus possible les horaires atypiques et en permettant davantage de souplesse horaire. Enfin, le management doit reposer sur la reconnaissance de l’expertise professionnelle, plutôt que sur des objectifs financiers.
Infirmières, éducateurs, agents de maîtrise, assistantes de direction… Les professions intermédiaires et techniciennes représentent aujourd’hui sept millions de salariés, soit un quart du salariat. Ces métiers ont en commun une forte expertise. L’Insee les divise en six catégories professionnelles : les professions intermédiaires administratives et commerciales (29 %), les professions de la santé et du social (23 %), les techniciens de l’industrie des travaux publics, de la logistique et de l’informatique (18 %), les professions de l’éducation (14 %), les contremaîtres (9 %), les professions intermédiaires de la fonction publique (7 %).
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