C’est en multipliant les amendements que les députés du « bloc central » sont parvenus à faire obstacle à l’abrogation de la réforme de 2023. Nous avons assisté à une longue journée durant laquelle les macronistes et les républicains, se sachant en minorité, ont utilisé la quasi-totalité du temps de parole pour empêcher l’adoption d’une proposition de loi portée par le Nouveau Front populaire. Tout l’arsenal de l’obstruction aura été utilisé pour jouer la montre jusqu’à la fin des débats.
Rappelons que lors du vote en Commission, les deux tiers de l’Assemblée se sont exprimés pour l’abrogation de cette réforme. Cela démontre que la bataille des retraites reste le point central de crispation dans notre pays. Depuis son passage en force, en mars 2023, après l’utilisation du 49.3, Emmanuel Macron traîne cela comme « le sparadrap du capitaine Haddock ». Cette dernière tentative de maintenir, à tout prix, la loi reculant l’âge de départ de deux ans pour toutes et tous, irrite toujours autant une majorité de français.
Abrogation : des propositions ont été faites pour la financer
Les organisations syndicales ont pourtant travaillé sur le coût de l’abrogation. Ce dernier, estimé à 0,6 point de Pib à l’horizon 2032, pourrait être financé par une hausse de cotisations de l’ordre de 0,15 point par an. Concrètement, cela représenterait quelques euros supplémentaires par mois à répartir entre employeurs et salariés, et ce pendant six ans.
À plus de 64 %, les cadres se montrent favorables à une hausse des cotisations des retraites payées par l’employeur pour bénéficier d’un meilleur niveau de pension de retraite. Ils et elles sont aussi plus de huit sur dix à se prononcer pour la prise en compte des années d’études, une proposition portée par la Cgt, notamment lors des négociations sur les retraites complémentaires Agirc-Arrco d’octobre 2023.
L’Ugict-Cgt a par ailleurs publié un sondage exclusif sur la manière dont les cadres envisagent leur fin de carrière. Ce sont pas moins de 83 % d’entre eux qui souhaitent bénéficier d’un droit à la retraite progressive leur permettant de travailler à temps partiel et de percevoir leur pension de retraite. Cette attente est encore plus forte dans le secteur privé, et en particulier dans le commerce, le secteur banque-assurance, et dans les entreprises de plus de 500 salarié·es.
Dans le même esprit, ils et elles se disent aussi favorables à l’instauration d’un passage à temps partiel « aidé », c’est-à-dire sans perte de salaire ni de cotisations retraites. Ils et elles sont encore 71 % à souhaiter bénéficier d’un droit leur permettant de consacrer une partie de leur temps de travail à des activités de tutorat, de mentorat ou de mécénat au sein de leur collectif de travail.
Fin de carrières : des aménagements plébiscités par les cadres
Alors que la France a l’un des taux les plus élevés de cadres de plus de 55 ans touchés par le chômage, il n’est pas étonnant que les aménagements de fin de carrière soient plébiscités par des catégories dont la santé (physique et/ou mentale) se dégrade très rapidement, du fait de leur forte exposition aux risques socio-organisationnels (surcharge de travail, temps de travail qui explose, stress, anxiété, burn-out…). Le dernier baromètre Ugict-Secafi-Viavoice a largement documenté cette situation dégradée. À tel point que 69 % des cadres souhaitent bénéficier d’un droit à des jours de télétravail garantis. Ils et elles sont presque autant (66 %) à revendiquer un droit à bénéficier d’une affectation sur un poste moins pénible, sans perte de salaire et avec une formation adaptée.
En 2023 déjà, l’Ugict montrait que 7 cadres seniors sur 10 (66 %) aspiraient à la réduction du temps de travail pour protéger leur santé (Baromètre ViaVoice-Secafi 2023). Dans une étude récente, l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) a rendu publics des chiffres alarmants, montrant que plus d’un ou une cadre sur deux dit ressentir « souvent ou occasionnellement un niveau de stress intense ». Cela impose de faire de la santé mentale au travail une priorité nationale.
Pour un droit à la retraite à 60 ans
La Cgt revendique le droit à la retraite dès 60 ans, avec 75 % du dernier salaire et la prise en compte des années d’études. Dans les entreprises et dans les branches professionnelles peuvent se négocier les modalités de rachat des années d’études permettant aux salarié·es qualifié·es à responsabilité de bénéficier de trimestres supplémentaires leur garantissant un meilleur niveau de pension. Ce droit doit être garanti pour l’ensemble du salariat.
Le dérapage des comptes publics sur la seule année 2024 est de 60 milliards d’euros. L’abrogation de la réforme des retraites de 2023 pèse d’une façon marginale dans ces comptes. Nous avons construit plusieurs pistes crédibles pour financer les retraites. Ne soyons pas dupes : nous sommes avant tout face à une volonté politique qui prive l’ensemble des salarié·es de ce pays d’un système plus juste.