Au temps où la cour des empereurs Ming était cousue d’or

Au musée Guimet, une exposition inédite met en lumière des trésors de l’orfèvrerie chinoise qui remontent à l’époque où fut édifiée la Cité interdite et bâti l’essentiel de la Grande Muraille.

Édition 057 de [Sommaire]

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Paire de bracelets. Dynastie Ming (1368-1644), or, Xi’an, musée des Beaux Arts de Quijang. Crédit. Peter Viem Kwok’s Dong Bo Zhai collection.

L’industriel lyonnais Louis Guimet (1836-1918), grand voyageur et collectionneur, fit ériger à Paris, en 1889, le musée dévolu aux arts asiatiques qui porte son nom. Cette institution présente, pour la rentrée, l’exposition «  L’or des Ming, Fastes et beautés de la Chine impériale XIVe-XVIIe siècles  ».

Grâce aux prêts du musée des Beaux-Arts de Qujiang (Xi’an, Chine), doté d’un ensemble exceptionnel de vases et de parures, il est loisible de découvrir des pièces d’un raffinement sans pareil. Certaines sont rehaussées de rubis, de saphirs bleus, jaunes ou verts, ou encore de jade blanc ou vert pâle, de perles d’eau douce ou de plumes de martin-pêcheur.

La blancheur du visage féminin chantée par les poètes

On estimait, à l’époque, que les bijoux en or mettaient en valeur la blancheur du visage féminin chantée par les poètes. Bracelets, boucles d’oreilles, bagues et épingles à cheveux, outre leur fonction de luxe ostentatoire, contribuaient en effet à imposer un idéal de la beauté aristocratique.

Epingle à cheveux à décor de phénix. Dynastie Ming (1368-1644), filigrane d’or serti de rubis et saphirs, Xi’an, musée des Beaux Arts de Quijang. Crédit. Peter Viem Kwork’s Dong Bo Zhai collection.

Le choix des motifs revêtait une fonction décisive. Les fleurs et les oiseaux étaient de bon augure. Le prunus évoquait l’hiver et la beauté, la pivoine le printemps et la richesse, le lotus la pureté de l’été… La chauve-souris symbolisait le bonheur, tandis que le crabe signifiait la réussite et le papillon la longévité. D’autres éléments relevaient de l’iconographie religieuse  : bâton du pèlerin bouddhiste, calebasse pour l’abondance et une descendance prospère, panier de fleurs associé à la fécondité.

Des dragons et des fleurs en dentelle de métal précieux

Les nobles pouvaient exhiber une vaisselle d’or et d’argent  ; assiettes, plats, coupes, verseuses, baguettes et cuillères. Destinée à des banquets suivis de libations, cette vaisselle, offrant parfois un décor baroque de phénix, de dragons ou de fleurs en dentelle de métal précieux, témoigne à l’envi de la virtuosité prodigieuse d’artisans rompus à l’art du filigrane et de la granulation.

En Chine, dès la plus haute antiquité, l’or a été considéré comme un symbole de richesse et de statut social, à l’instar du bronze, du jade et de la soie. Sous le règne des Ming, l’argent devenant la principale valeur monétaire, l’or ne fut plus utilisé que pour la fabrication et l’ornement d’objets de luxe  : vaisselle d’apparat et joaillerie.

Grandeur et décadence de la dynastie des empereurs Ming

Les Ming sont une lignée d’empereurs qui a gouverné la Chine durant deux cent soixante-seize ans, de 1368 à 1644. Ils ont remplacé la dynastie mongole Yuan. Sous le règne des Ming, malgré des problèmes intérieurs et extérieurs, la Chine a connu une période de prospérité économique et l’accroissement de sa population.

Les Ming ont édifié à Pékin la Cité interdite, résidence impériale. La littérature et les arts ont connu un bel essor. Les porcelaines Ming bleues et blanches sont toujours recherchées. L’eunuque chinois musulman Zheng He (1371-1433), célèbre explorateur maritime, est allé jusque sur les côtes africaines. Affaiblis par des dépenses excessives et des révoltes paysannes, les Ming ne purent résister à l’invasion mandchoue, qui établit la dynastie Qing, qui régnera de 1644 à 1911.

Stéphane Harcourt