À Sète, des collectionneurs d’arts modestes sont en liberté

Sous l’intitulé «  Libres  ! Collectionneurs d’arts modestes  », deux collections privées d’importance sont montrées au public pour la première fois, au Musée international des arts modestes (Miam), dont il a déjà été question dans Options.

Cette institution a été inaugurée en novembre 2000 dans un ancien chai de la ville de Sète par le peintre Hervé Di Rosa, natif de la ville, et par l’artiste et collectionneur Bernard Belluc. Le Miam s’attache à mettre en relief une notion inspirée par un mot d’enfant  : en 1988, au Musée d’art moderne de la Ville de Paris, Di Rosa a entendu une fillette demander à sa mère quand elle pourrait revenir au «  musée d’art modeste  ».

En opposition subtile avec la prétention d’artistes conformistes   

Le mot fait mouche  ; Di Rosa, membre actif du mouvement de la figuration libre, né dans les années 1980, l’adopte aussitôt. La définition s’accorde au principe d’humilité qui fonde son œuvre, en opposition subtile avec la prétention d’artistes conformistes ou farouchement élitistes.

Di Rosa sera d’ailleurs amené à dire ceci : «  Il n’y a pas d’œuvre modeste, il n’y a que des collections modestes.  » Il ajoutera  : «  Peut-être que le seul artiste modeste c’est le collectionneur, celui qui a la volonté de rassembler des choses en toute modestie, puisque ce n’est pas lui qui les fait.  »

L’exposition s’ouvre, dans l’ensemble du rez-de-chaussée du Miam, sur la collection FB/DL. Elle est riche d’œuvres d’Hervé Di Rosa et de nombreux autres artistes, reconnus ou méconnus, émergents, singuliers. La plupart entretiennent une relation éminemment personnelle avec les collectionneurs.

Au beau milieu d’un environnement d’objets populaires 

La collection FB/DL, qui ne néglige pas pour autant les expressions extra-européennes, notamment celles ayant trait à l’art africain contemporain, s’offre au beau milieu d’un environnement d’objets populaires, dans l’appartement même des collectionneurs.

Outre Hervé Di Rosa, on relève, dans un univers collectif intensément coloré, significatif du bonheur de vivre, les noms de Rémi Blanchard, Robert Combas, François Boisrond, Yan Pei Ming, Kwame Akoto, Abdelkader Benchamma, Cyprien Tokoudagba, Claude Viallat, Stéphane Pencréac’h, Chukie Williams, Christine Viennet, etc.

Un exceptionnel assortiment de figures de magie Brésilienne

C’est à l’étage du musée que se trouve la collection MB/JB. Édifiée depuis une bonne cinquantaine d’années, elle est d’abord structurée autour de deux artistes appartenant à la seconde génération du surréalisme  ; Félix Labisse (1905-1982) et Lucien Coutaud (1904-1977), puis elle révèle un exceptionnel assortiment de figures de magie brésilienne.

La collection MB/JB, qui s’inscrit indubitablement sous les signes mêlés d’Éros et de Thanatos, investit totalement les espaces d’un vaste appartement, avec ses livres rares, bon nombre d’objets inattendus, des meubles de théâtre et, bien sûr, ses œuvres étonnamment diverses d’artistes contemporains. Elle suscite une belle atmosphère d’étrangeté, au sein de laquelle la peinture figurative, à la lisière de l’imaginaire surréaliste, voisine avec les mystérieux protocoles de la magie noire. 

On note à l’évidence que ces deux collections, au-delà de leurs différences inéluctables, ont pourtant en commun de s’être instaurées, l’une comme l’autre, sur la solide base d’un courant artistique, ainsi que de fortes relations avec tels ou tels artistes. N’est-ce pas question de goût, à la toute fin  ? Il est clair que l’absolue liberté de ces collectionneurs, dont les choix résolument ouverts peuvent aller d’œuvres dûment caractérisées à de simples objets manufacturés, de l’art à l’artisanat, correspond en tous points à l’état d’esprit du Miam

• Du 15 décembre au 26 mai 2024, au Musée international des arts modestes (Miam), 23, quai Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, à Sète (Hérault).