Platines – Une fugue inédite de Keith Jarrett 

En 1975, Keith Jarrett composa « Ritual », une œuvre pour piano seul qu’il ne joua jamais. François Mardirossian, qui en a déniché la partition, en propose son interprétation.

Édition 068 de fin mars 2025 [Sommaire]

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Keith Jarrett fascine autant qu’il déroute ou laisse perplexe. Pianiste hors pair, doué aussi bien pour le clavecin, le saxophone, la guitare ou les percussions, à l’aise dans le répertoire classique et dans le jazz, doté d’un sens certain de l’humour, celui qui aura 80 ans le 8 mai 2025 s’est aussi taillé une solide réputation de caractériel au fil de ses cinquante années de carrière, la moindre quinte de toux ou le moindre avion qui passe pouvant lui faire quitter la scène. 

En 1976, il se révélait avec une longue et profonde inspiration, le Köln Concert. Mais il faut savoir qu’un an plus tôt, ce natif d’Allentown (Pennsylvanie) composait Ritual, une pièce de trente minutes conçue autour de la répétition d’un motif initial qui contient tout ce qui fera le style unique de Jarrett  : exploration sonore, mystère, épisodes introspectifs, envolées plus lyriques, réminiscences de musiques anciennes et échos du XXe siècle. Le pianiste lyonnais François Mardirossian est l’une des quatre personnes au monde à posséder la partition de Ritual. Lorsqu’il la découvre en 2024, il propose de l’enregistrer à son label Ad Vitam, pour qui il a déjà gravé des œuvres de Philip Glass et d’Erik Satie. Acceptation immédiate. 

Mardirossian interprète donc Ritual, une fugue et trois œuvres datant de la même époque, notamment My Song, qui a donné son nom à l’album sorti en 1977 – peut-être le meilleur des 150 enregistrés par Jarrett –, et Tokyo Encore, suite d’accords répétitifs sur une ligne de basse évoquant Purcell, entre lamentations et aspirations, tour à tour silencieuses et expansives.

  • François Mardirossian, Keith Jarrett. Ritual et Encores, 2025, 1 Cd Ad Vitam, 18 euros.