Chronique juridique -  Comité social et économique : le respect des délais de consultation

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Les délais de consultation du comité social et économique (Cse) doivent être suffisants pour lui permettre d’émettre un avis. La jurisprudence apporte de nouvelles précisions importantes sur le calcul de ces délais et notamment sur la possibilité de les modifier par accord entre l’employeur et le comité social et économique.

Le nouveau droit applicable

Depuis l’entrée en vigueur des lois n° 2013-504 du 14 juin 2013 (« loi Sapin ») et n° 2018-994 du 17 août 2015 (« Rebsamen »), la procédure d’information-consultation des institutions représentatives du personnel est encadrée par des délais qui peuvent être fixés par accord. À défaut d’accord, et lorsque la loi ne fixe pas de délais spécifiques, les délais de consultation du comité sont fixés par décret. À l’expiration de ce délai, le comité est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif.

Depuis les nouveaux textes (ordonnance et décret de l’automne 2017), le Code du travail prévoit :

  • Le comité social et économique émet des avis et des vœux dans l’exercice de ses attributions consultatives ;
  • il dispose à cette fin d’un délai d’examen suffisant et d’informations précises et écrites, transmises ou mises à disposition par l’employeur, et de la réponse motivée de l’employeur à ses propres observations (art. L. 2312-15).

Sauf dispositions législatives spéciales, l’accord d’entreprise ou, en l’absence de délégué syndical, un accord entre l’employeur et le comité social et économique ou, le cas échéant, le comité social et économique central, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, ou, à défaut d’accord, un décret fixe les délais dans lesquels les avis du comité social et économique ou, le cas échéant, du comité social et économique central sont rendus dans le cadre des consultations.

Ces délais permettent au comité social et économique ou, le cas échéant, au comité central d’exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l’importance des questions qui lui sont soumises (art. L. 2312-16).

Pour l’ensemble des consultations pour lesquelles la loi n’a pas fixé de délai spécifique, le délai de consultation du comité social et économique court à compter de la communication par l’employeur des informations prévues par le Code du travail pour la consultation ou de l’information par l’employeur de leur mise à disposition dans la base de données économiques et sociales (art. R. 2312-5).

L’affaire

Faits et procédure

Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 8 janvier 2019), statuant en la forme des référés, le comité d’entreprise de la société Lur Berri a désigné un expert-comptable pour l’assister dans le cadre des consultations annuelles obligatoires notamment sur la situation économique et financière et la politique sociale de l’entreprise.

Invoquant le dépassement par l’expert des délais impartis pour l’exercice de sa mission, la société a saisi le président du tribunal de grande instance pour voir dire que les honoraires réclamés par l’expert n’étaient pas dus.

Réponse de la Cour de cassation, chambre sociale (arrêt du 8 juillet 2020, Scop Syndex c/ Lur Berri)

« 5. Le délai court à compter de la date à laquelle le comité d’entreprise a reçu une information le mettant en mesure d’apprécier l’importance de l’opération envisagée et de saisir le président du tribunal de grande instance s’il estime que l’information communiquée est insuffisante.

6. Un accord collectif de droit commun ou un accord entre le comité d’entreprise et l’employeur peut cependant fixer d’autres délais […], les prolonger, ou modifier leur point de départ.

7. En l’espèce, la cour d’appel a constaté, par motifs propres et adoptés, qu’à la suite d’échanges avec le comité d’entreprise et le cabinet d’expertise, l’employeur a abondé la base de données économiques et sociales le 23 janvier 2017, provoqué une réunion extraordinaire du comité d’entreprise le 16 février 2017 pour discuter du périmètre et du coût de l’expertise puis fixé, conjointement avec le secrétaire du comité d’entreprise, au 27 avril 2017 la date de restitution des travaux d’expertise et de remise des avis du comité d’entreprise.

8. La cour d’appel a pu déduire de ses constatations que les délais de consultation du comité d’entreprise, et par conséquent de l’expertise, avaient d’un commun accord été prolongés jusqu’au 27 avril 2017 de sorte que le rapport d’expertise remis avant cette date n’avait pas été déposé hors délai. »

Apport de la décision

La chambre sociale « admet une certaine souplesse dans la forme de l’accord modifiant les délais de consultation. Pour tenir compte des réalités des négociations de terrain, et éviter le contentieux que pourrait générer une appréciation trop stricte de la condition d’accord, l’arrêt admet que la fixation d’un commun accord entre l’employeur et le comité d’entreprise, dans le cadre de discussions sur les pièces à fournir et sur ces délais, d’une date ultérieure pour la réunion au cours de laquelle le comité d’entreprise devait rendre son avis vaut accord de prorogation des délais.

« Il en résulte que l’accord permettant de modifier les délais de consultation […] peut s’entendre, soit d’un accord collectif de droit commun, soit d’un accord avéré entre l’employeur et le comité d’entreprise. » (Lettre de la chambre sociale n° 5, juillet 2020).

Michel Chapuis